3 à 10 kg de protéines végétales pour 1 kg de viande : vraiment ?

La prise en compte des aliments non consommables par l’homme, comme l’herbe, mais aussi les coproduits agroalimentaires, comme les issues de meuneries, les tourteaux et les pulpes, confère à de nombreux élevages une contribution positive à la production de protéines de qualité́ pour l’alimentation humaine, selon le GIS « Élevages Demain ».

L'efficience protéique nette : tel est le ratio faisant l'objet d'un programme de recherche du Groupement d'intérêt scientifique (GIS) « Élevages Demain ». Il consiste à faire le rapport entre les produits de l'élevage consommables par l'homme et les végétaux potentiellement consommables par l'homme mais distribués aux animaux. Autrement dit, il ne considère que les aliments faisant l'objet d'une compétition entre l'homme et les animaux d'élevage. Il exclut ainsi la part d'aliments consommés par les animaux mais pas par l'homme. Il s'agit en premier lieu de l'herbe  mais également de toute une flopée de sous-produits des industries agroalimentaires : coproduits de céréales (issus de meunerie, amidonnerie, distillerie), de protéagineux (coproduits du pois), d'oléagineux (tourteaux de colza, tournesol), de fruits (pulpes de citrus), de légumes et de tubercules (pulpe de betterave, de pomme de terre) ainsi que du lait (lactosérum issu de fromageries). Autant de produits sur lesquels lorgne également la bioéconomie (bio-matériaux, bio-molécules, biocarburants, biogaz, chaleur, engrais et amendement organiques).

Contributeur net de protéines

Résultats ? De nombreux élevages peuvent avoir une contribution positive à la production de protéines de qualité́ pour l'alimentation humaine. De quoi nuancer les critiques concernant la faible efficience de conversion des ressources végétales par l'élevage et les fameux 3 à 10 kg de protéines végétales nécessaires pour 1 kg de viande. Selon le GIS « Élevages Demain », (consortium de 16 organismes dont l'INRA, l'Idele...) qui travaille  sur les systèmes de production animale à hautes performances économiques, environnementales et sociétales, les monogastriques (porcs conventionnels, poulets de chair standard, poules pondeuses) produisent entre 0,7 et 1,6 kg de protéines animales par kg de protéines végétales consommables par l'homme selon les modes d'alimentation. Les élevages bovins laitiers produisent de 0,6 jusqu'à plus de 2 kg de protéines animales pour 1 kg de protéines végétales consommables par l'homme. Leur efficience nette est d'autant plus importante que la part d'herbe dans la ration s'accroit. La production de viande de ruminant est en revanche moins efficiente, mais surtout très variable. Si certains systèmes transhumants ne consomment aucune protéine consommable par l'homme et ont donc une efficience « infinie », certains ateliers d'engraissement produisent à peine 0,2 kg de protéines animales consommables par kg de protéines végétales consommables.

Leviers et autres incidences

Les principaux leviers d'amélioration de l'efficience nette reposent sur le choix des matières premières pour l'alimentation animale, l'amélioration de la valeur alimentaire de ces matières premières et la sélection d'animaux aptes à bien les valoriser. Et pour raisonner plus finement encore la concurrence entre productions animales et productions végétales, le GIS mise de sur de nouveaux ratios, intégrant la qualité des protéines ou le bilan énergétique de la digestion qui sont beaucoup plus élevées pour les produits animaux que pour les produits végétaux. Selon le GIS, de tels ratios fourniraient des résultats supérieurs aux ratios actuels d'efficience nette. A contrario, l'accroissement éventuel de la valorisation en alimentation humaine des ressources végétales, du fait soit de changements d'habitudes alimentaires, soit de progrès technologiques, va contribuer à réduire l'efficience nette des élevages, mais dans une moindre mesure pour les systèmes de ruminants valorisant beaucoup d'herbe. Le GIS précise par ailleurs que le calcul d'efficience protéique nette pour l'alimentation humaine ne considère pas toutes les autres protéines produites par l'animal, qui n'entrent pas dans la chaine alimentaire, mais qui sont valorisées par d'autres filières créant de la valeur ajoutée : cuir, cosmétique, alimentation pour animaux de compagnie...

15 000 litres d'eau ?

S'agissant de la consommation d'eau, les chiffres fréquemment cités font état de 15.000 l par kg de viande. Ils sont issus de la méthode Waterfootprint, laquelle prend en compte « l'eau bleue », qui correspond à l'abreuvement, « l'eau grise », qui représente à la consommation nécessaire à la préservation de sa qualité et enfin « l'eau verte », c'est à dire l'eau de pluie absorbée et évaporée par les surfaces fourragères. Cette « eau verte » représente 94% des 15.000 l suscités. Abstraction faite de cette eau de pluie, c'est 50 l d'eau qui sont réellement nécessaires pour produire 1 kg de viande bovine.