« Les entrepreneurs sur le chemin de la mutualisation »

A l’occasion du Salon des Eta, qui se tient au Mans (72) les 13 et 14 décembre, Gérard Napias, président de la Fédération nationale des entrepreneurs des territoires (FNEDT) fait le point sur la situation des entrepreneurs de travaux agricoles, ruraux et forestiers.

Comment les entrepreneurs traversent-ils l'atonie persistante des cours des produits agricoles, qui impacte les finances de leurs clients agriculteurs ?

Gérard Napias : si les prix des produits agricoles restent faibles, la situation s'est un peu améliorée sous l'effet des rendements enregistrés en 2017, comparativement à 2016. De fait, beaucoup d'agriculteurs ont pu régulariser leur situation vis à vis de leurs prestataires. C'est de bon augure pour la poursuite des relations entre les deux parties.

Agriculture, forêt, travaux ruraux : des secteurs s'en sortent-ils mieux que d'autres ?

G.N. : en agriculture, les entrepreneurs sont soumis aux fluctuations de résultats des exploitations agricoles. Il y a des disparités selon les régions et les orientations des exploitations. Dans l'Ouest, il y a du travail mais le prix du porc est en baisse. Dans le Sud-Oued, la filière avicole se remet difficilement de la grippe aviaire. En ce qui concerne les collectivités, les rapprochements entre communes combinés à la baisse des dotations pèsent sur l'activité et les trésoreries des entreprises. C'est tout aussi tendu dans l'univers de la forêt. Même s'il y a de l'activité dans certains massifs, les appels d'offrent tirent les prix vers le bas.

Entre concurrence et inflation du prix des machines, l'équation des entrepreneurs de travaux est-elle tenable ?

G.N. : les entrepreneurs sont contraints d'adopter les nouvelles technologies, sous peine d'être disqualifiés par leurs clients. Ce n'est pas tant le prix que l'exploitation pleine et entière de ces nouvelles technologies qui pose problème. Lorsque les technologies sont sous-exploitées, il est difficile pour les entrepreneurs de traduire leur surcoût en plus-values sur les prestations. La mutualisation des moyens matériels et immatériels est une piste d'adaptation.

La mutualisation ne s'oppose-t-elle pas à la logique individualiste des entreprises ?

G.N. : les entrepreneurs sont en train de repenser leur individualité pour aborder une phase de mutualisation et de mise en réseau des moyens et des compétences. Cette évolution ne remet pas en cause leur bien-fondé. Il faut faire jouer la complémentarité entre les entreprises pour pouvoir apporter une bonne qualité de service aux agriculteurs, qui eux-mêmes se métamorphosent. Le développement du numérique, la gestion des données, ou encore la robotisation sont autant de prétextes à cette quête de mutualisation.

Quelles sont les doléances de la FNEDT vis à vis des pouvoirs publics ?

G.N. : nous allons rencontrer le ministre de l'Agriculture en janvier. Nous allons réaffirmer la nécessité d'accompagner le développement des entrepreneurs de travaux, qui sont des facilitateurs de l'installation des jeunes agriculteurs. Nous sommes également des pourfendeurs de l'endettement des agriculteurs.  En 2017, on est encore sous la gouverne d'un texte de 1946 qui dit que pour être exploitant agricole, il faut posséder son propre matériel. On peut être un très bon agriculteur en dématérialisant son exploitation et en s'appuyant sur des structures parallèles.

Propos recueillis par R.L