Les agriculteurs en conservation des sols lancent un label

Les paysans qui pratiquent l'agriculture de conservation des sols, vont lancer un label pour la défendre, alors que son existence même est menacée par l'évolution de la réglementation en matière de pesticides.

"On considère qu'il y a 2% des agriculteurs français qui sont en agriculture de conservation des sols, selon la définition de la FAO (l'agence des Nations unies pour l'alimentation, ndlr), qu'on porte dans la construction de ce label +Au coeur des sols+", a expliqué jeudi François Mandin, agriculteur en Vendée et président de l'Association pour la promotion d'une agriculture durable (Apad). L'agriculture de conservation des sols (ACS) est un système de culture qui permet au sol d'augmenter sa matière organique, d'améliorer sa fertilité et de limiter l'érosion, en utilisant la nature et en ne laissant jamais les sols nus. Elle requiert l'abandon du labour et de tout travail du sol, ainsi que la plantation de cultures intermédiaires, comme les légumineuses porteuses d'azote pour enrichir le sol.

Devant le manque de reconnaissance de ce système de production en France, M. Mandin souhaite lancer le label "Au coeur des sols" lors du prochain Salon de l'agriculture. Il estime qu'à l'heure où "l'ensemble des produits phytosanitaires est sur la sellette", l'ACS, qui permet "une réduction très rapide de 60, 70, voire 80% de l'usage des fongicides et insecticides", a une carte à jouer. Seul hic, elle nécessite, au moins une fois par an, un désherbant chimique de type glyphosate pour nettoyer le sol des mauvaises herbes et implanter une culture en semis direct sans labour, et donc l'utilisation d'un produit que la France souhaite interdire d'ici 2021, à l'exception de dérogations pour certains usages.

"Sur la question du désherbage, il faut être clair, il n'y a pas de capacité à court terme de pouvoir se passer de désherbage chimique en agriculture de conservation des sols", indique M. Mandin. "La chimie peut être d'origine biologique, mais avec des efficacités pour l'instant trop faible, au regard des risques pris", ajoute-t-il. Il estime d'ailleurs qu'"il serait contre-productif d'interdire un produit de ce type-là utilisé en France uniquement en interculture", et donc avec "zéro risque de présence de résidus". Quelque 60 fermes ont déjà été labellisées, selon M. Mandin, qui souhaite que 200 agriculteurs aient adopté d'ici fin 2020 ce qui est pour l'instant un "label privé entre les mains des agriculteurs", avant que, dans un deuxième temps, les processus d'audit puissent être contrôlés par un organisme extérieur.