Filière caprine : quel intérêt à tendre vers l'autonomie protéique ?

Éleveurs, organismes professionnels, conseillers et étudiants en CS caprin étaient rassemblés, le 7 février à Écueillé (36) puis à Heugnes (36), lors de la journée technique caprine d’Indre Lait. L’occasion d’aborder un thème dont la filière doit se saisir : l’autonomie protéique.

Portée par Indre Lait et la chambre d’agriculture de l’Indre, la journée technique caprine s’est tenue à Ecueillé pour l’assemblée générale, le 7 février. Au cœur de la réunion, Brenda Oviedo, conseillère caprine à la chambre d’agriculture de l’Indre, est intervenue afin d’aborder les avantages et leviers d’action pour tendre vers l’autonomie protéique.

L’AUTONOMIE PROTÉIQUE : OÙ EN EST-ON ?

Brenda Oviedo a tout d’abord fait état de la dépendance de la France vis-à-vis des importations protéiques. Le tourteau de soja représente plus de 90% des importations avec toutes les controverses qu’il suscite, notamment environnementales.

"Du fait de cette dépendance, le pays subit également les fluctuations du marché"

L’état français a mis en place un plan de relance protéines sur deux ans (2021-2022) axé sur trois leviers : réduire la dépendance aux importations de matières riches en protéines (notamment soja), développer une offre de produits locaux en matière de légumes secs et améliorer l’autonomie alimentaire des élevages. L’objectif sur une décennie est de doubler les surfaces en oléo-protéagineux et légumineuses fourragères (8% de la SAU, soit 2 millions d’hectares). Aujourd’hui, la filière caprine n’est autonome en protéines qu’à hauteur de 47%, alors que la filière bovin lait est à un taux de 70% et celle des ovins lait à 68%. Cette autonomie change selon les systèmes qui sont très variés dans la filière. L’écart avec les autres filières peut s’expliquer par un accès au foncier plus limité.  

Différents leviers peuvent être mis en place afin d’optimiser l’autonomie protéique : optimiser le système alimentaire, améliorer la qualité des fourrages et maximiser leur valorisation et enfin produire ses concentrés qui d’un point vu massique va jouer un rôle moins important.  

La limitation du gaspillage est un point de vigilance indéniable pour tendre vers l’autonomie protéique. « Aujourd’hui, on a tendance à suralimenter les chèvres en protéines » commente la conseillère. Selon FCEL (France Conseil Elevage), sur 3800 rations seuls 12% des rations observées sont à l’équilibre, alors que 83% seraient en excès modéré ou important en protéines digestibles. 

DES ESSAIS DANS L’ATTENTE DE RÉSULTATS 

Des essais sont en cours et à venir dans le cadre du programme Cap protéines en caprin et ovin lait. Une première expérimentation sur le soja toasté a été menée dans une exploitation à Melle (79). Le processus consistait à remplacer le correcteur par du soja toasté sur 120 chèvres, pendant neuf semaines (0,45 kg du correcteur vs. 0,4 kg de soja toasté + 0,25 kg de correcteur). A la fin, peu d’effets significatifs de la ration ont été enregistrés sur le lait brut et standard. En revanche, il a été observé un effet relatif sur le TB lié au taux de MG de la ration.

Un second essai est mené à la ferme expérimentale caprine du Pradel (07) sur 96 chèvres en fin de lactation ou future lactation longue. L’idée est de voir l’impact de la présentation d’un mélange céréale-protéagineux aplati ou non (orge 0,2kg + maïs 0,25kg + fèverole 0,35kg) sur une ration à base de foin de luzerne. Pour le moment aucune différence notable n’a été observée, mais d’autres essais vont être refaits afin de confirmer ces résultats.

EST-CE TOUJOURS INTÉRESSANT D’ÊTRE AUTONOME ? 

D’un point de vue économique, l’autonomie protéique apporte de la stabilité au revenu. En effet, sur les exploitations suivies dans le programme Cap-protéines, l’écart du revenu par UMO après la hausse du coût des intrants (2021-2022) était de - 0.05 SMIC/UMO sur les exploitations les plus autonomes (63 % d’autonomie) contre - 0.2 SMIC/UMO pour les exploitations les moins autonomes (32 % d’autonomie). L’équilibre entre autonomie et économie doit être trouvé en fonction de la structure, du matériel, de la main-d’œuvre. Du point du vue qualitatif et quantitatif, produire des fourrages et des céréales vont souvent de pair avec l’équilibre économique. Sans oublier de prendre garde aux effets seuil, par rapport aux derniers points d’autonomie notamment aux cultures de complémentation protéique.