Agroéquipements : prix et délais de livraison à la hausse

Les difficultés d’approvisionnement en matières premières et composants pénalisent fortement les industriels. Elles vont inévitablement engendrer des hausses de prix du matériel, dont la demande ne faiblit pas. La filière mise sur une progression du marché du neuf de 6% en 2021.

« D’ici un mois ou deux, certains industriels devraient annoncer des délais de livraison débordant sur 2022 », déclare Jean-Christophe Régnier, président de la Commission économique d’Axema, le syndicat des industriels de l’agroéquipement. A l’occasion d’une conférence de presse, le syndicat a fait part de ses difficultés d’approvisionnement en matières premières et composants. La problématique n’est pas spécifique à l’agroéquipement « made » in France. Elle concerne l’ensemble des secteurs industriels au plan mondial, sous l’effet de la reprise économique post-Covid. 94% des adhérents d’Axema affirment rencontrer des difficultés d’approvisionnement tandis que 75% sont confrontés à phénomènes de pénurie.

Des quotas d’acier mortifères

A ces problématiques d’approvisionnement s’ajoutent la hausse des prix. « Le cours de l’acier a bondi de 50% au cours des 12 derniers mois, affirme David Targy, responsable du service économique d’Axema. L’acier représente en moyenne entre 30% et 40% du coût des matériels. Les coûts de l’énergie et des transports sont également en hausse ».

En ce qui concerne spécifiquement l’acier, la situation est aggravée par un règlement d’exemption mis en place en 2019 par l’Union européenne, instaurant des quotas d’importation par pays membre et par catégorie d’acier pour les achats réalisés hors UE. Ces quotas sont destinés à protéger la sidérurgie européenne. « Ce règlement engendre un marasme pour l’ensemble de l’industrie mécanique européenne, dénonce Alain Savary, directeur général d’Axema. Il est certes possible d’importer hors quota, moyennant des droits de douane majorés de 25%, mais sans savoir au moment de la commande si vous serez soumis ou non à la taxe. Le problème est que la production européenne ne suit pas la demande. Nous n’avons pas de cotation et pas de livraisons programmées pour le second semestre 2021 ». Jusqu’à présent, les demandes d’annulation de ce règlement, réitérées encore dernièrement auprès du ministère de l’Économie, sont restées lettre morte.

Des prix en hausse

Les difficultés d’approvisionnement, combinées à la hausse des prix des matières premières, de l’énergie et des transports, engendreront inévitablement des hausses de prix du matériel. « La reprise du marché des agroéquipements dans toute l’Europe ajoute à la tension », indique David Targy. Axema s’est gardé de donner la moindre projection à ce sujet. « En tant que syndicat professionnel, il nous est interdit d’être en possession de ce type d’information », justifie Alain Savary, renvoyant la question à chaque constructeur. « Les surcoûts ne sont pas forcément intégralement répercutés sur le prix du matériel pour des questions de compétitivité », relativise Jean-Christophe Régnier.

"95% des adhérents d’Axema pensent augmenter leurs tarifs"

Il est cependant difficile d’imaginer un autre scénario, d’autant que l’industrie des agroéquipements est handicapée par la faiblesse de ses marges, deux fois moindre que celle enregistrée dans les autres industries mécaniques, selon Axema. 95% des adhérents du syndicat estiment que la situation ne va pas leur laisser d’autre choix que d’augmenter les prix, 53% escomptent réduire leurs charges, 13% craignent des arrêts de production.

Un marché attendu en hausse

En dépit de ces tensions, Axema anticipe une hausse du marché des matériels neufs sur le territoire national en 2021, de l’ordre de 6%, et qui pourrait ainsi s’établir à 6,4 milliards d’euros, contre un chiffre encore provisoire de 6 milliards d’euros en 2020, en très léger retrait (-0,5%) par rapport à 2019. « Les agriculteurs ont continué à produire et la filière a fait preuve de résilience », se félicite Jean-Christophe Régnier.

Le Plan de relance et ses 220 millions d’euros fléchés vers les agroéquipements de transition et de parade aux aléas devraient grossir les chaines de production dans les mois à venir. Axema s’est félicité de son caractère « accélérateur de transition » tout en regrettant son défaut d’étalement dans le temps, le succès fulgurant des mesures étant « peu compatible avec les facultés d’adaptation des industriels et des réseaux de distribution ».