Bleu-blanc-cœur : santé des animaux, des hommes et de la terre peuvent aller de pair

La démarche Bleu-blanc-cœur s’attache, depuis ses débuts, à prouver scientifiquement les liens entre santé animale, santé humaine et respect de l’environnement. Depuis 15 ans, elle organise chaque année une journée de restitution de travaux et de retours d’expérience des acteurs engagés. C’était le cas à Rennes, le 9 novembre dernier.

Avant même que le concept de « One Health » ne soit connu et « à la mode » (au point qu’il est parfois repris à toutes les sauces), la démarche Bleu-blanc-cœur, imaginée il y a une trentaine d’années, avait déjà appréhendé ses fondements : l’amélioration de la nutrition des animaux par un enrichissement en acides gras oméga 3 de leur ration (via l’herbe, le lin, la luzerne, la féverole...) améliore la qualité nutritionnelle de leurs produits pour les humains, et donc, potentiellement, leur santé. Ces derniers ont en effet, en général, des apports alimentaires en acides gras oméga 3 inférieurs aux préconisations du PNNS (Programme national nutrition et santé).

En outre, lorsque ces sources d’acides gras oméga 3 sont produites localement, de façon agroécologique, elles réduisent l’impact environnemental de cette alimentation animale si souvent décriée (maïs, soja, concurrence avec l’alimentation humaine...). Cerise sur le gâteau, si toute une filière s’engage et que le produit final livré au consommateur se différencie en arborant un logo spécifique, la démarche peut rapporter une plus-value intéressante aux agriculteurs.

Les vaches au pâturage sont en meilleure forme

Ce n’est pas un hasard si cette démarche a le souci de la répartition de la valeur tout au long de la chaîne et si elle porte une attention particulière au maillon de la production agricole : Bleu-blanc-cœur est née de la rencontre entre un éleveur, Jean-Pierre Pasquet, et un ingénieur agronome, Pierre Weill, il y a une trentaine d’années. Tous deux avaient constaté que les vaches étaient en meilleure santé et produisaient un beurre plus tartinable lorsqu’elles étaient en pleine saison de pâturage.

L’hypothèse d’un rôle favorable des oméga 3 est alors envisagée et elle est validée par des premiers résultats sur la santé animale. Les deux hommes se rapprochent alors d’un médecin nutritionniste, Bernard Schmitt, qui leur confirme via une étude clinique que les produits d’animaux nourris avec des aliments riches en oméga 3 sont également nutritionnellement intéressants pour les humains.

Les produits Bleu-blanc-cœur sont plus riches en acides gras oméga 3 que les produits classiques. Cet enrichissement leur permet d’avoir des profils nutritionnels intéressants dans un contexte où les apports moyens des Français en ces acides gras sont inférieurs aux préconisations du PNNS (Programme national nutrition et santé). (Photo BBC)

« Nous avons une obligation de résultats »

Munis de ces premiers travaux scientifiques, les trois hommes fondent alors, en 2000, une association, qui, depuis, n’a eu de cesse de progresser de façon équilibrée sur les trois piliers, santé des animaux, de la terre et des hommes, et de systématiquement prouver ses « progrès » via des travaux scientifiques. L’association travaille ainsi avec plus d’une centaine de chercheurs et médecins, de l’Inrae, de l’Inserm et des CHU, et, depuis 15 ans, elle fait le point sur ces travaux lors de journées One Health. « Nous avons une obligation de résultats », rappelle Pierre Weill, lors de la dernière journée de ce type qui s’est tenue à Rennes, le 9 novembre dernier. « Nous ne faisons pas de la com’, nous donnons des informations ».

Grâce à ces résultats (bien communiqués toutefois !), la petite association a bien grandi, au point de rassembler aujourd’hui près de 9000 agriculteurs : environ 7000 peuvent valoriser leurs produits dans une filière (longue ou courte car il y a aussi des producteurs fermiers) et 1700 agriculteurs ne le peuvent pas car ils n’ont pas de débouchés spécifiques (leur laiterie, abattoir, centre de conditionnement d’œufs… n’est pas adhérent).

« Ces agriculteurs adhèrent au projet, à ses valeurs, pour participer à la communauté Bleu-blanc-cœur », précise Nathalie Kerhoas, la directrice de l’association. Ils auront peut-être quand même des retombées économiques de cette adhésion, car « pour la moitié d'entre eux, ils sont aussi partie prenante de notre démarche environnementale Ecométhane ». En effet, parmi les nombreux bénéfices prouvés de la démarche figure l’amélioration du bilan carbone des produits (13% en moyenne).

Agronome, Pierre Weill est l’un des trois coprésidents de l’association, aux côtés de Jean-Pierre Pasquet, éleveur laitier, et Bernard Schmitt, médecin nutritionniste. (Photo Catherine Perrot)

Une étude étonnante sur l’allaitement

Pour cette édition 2023, l’étude scientifique « vedette » de la journée était celle sur l’allaitement des femmes, dont les résultats sont très significatifs : des femmes qui ont consommé à partir du dernier trimestre de grossesse, des menus Bleu-blanc-cœur (avec viandes, produits laitiers, œufs, farines de lin..), ont un lait 35% plus riche en oméga 3 que des femmes ayant consommé les mêmes produits standards.

Lorsqu’on sait qu’une déficience alimentaire en oméga 3 pendant la grossesse peut induire des troubles du développement neurofonctionnel chez l’humain, ce résultat est très important. Mieux encore, cette modification du profil en acide gras du lait maternel est meilleure en alimentant les mères avec des produits d’animaux nourris avec des omégas 3 que si on leur avait distribué la même quantité d’acides gras en supplémentation !

Finalement, ce seront peut-être les éleveurs qui seront les moins surpris par ces résultats : ils sont nombreux à avoir constaté, et témoigné lors de la journée, que bien nourrir leurs animaux, avec des aliments diversifiés, et notamment avec des aliments riches en acides gras oméga 3 (herbe, lin, luzerne...), était le gage de leur meilleure santé, longévité, reproduction et performances. Ne disent-ils pas d’ailleurs qu’ils vont « soigner leurs vaches » quand ils les alimentent ? Là-dessus aussi, Bleu-blanc-cœur dispose d’études scientifiques vétérinaires qui prouvent la réalité de leurs observations.