[Culturales] "Si vous connaissez des gens qui mangent de l’herbe..."

A Meurcourt (Haute-Saône), le Gaec Courtoy ne fait pas dans la demi-mesure : 650 ha, 7 associés, 4 productions animales, 100 % de vente directe, bientôt un 3ème méthaniseur, 2 cultures par an et 1 certitude : le bio en ligne de mire.

Que des céréaliers aux Culturales ? Que nenni. Manuel Courtoy a parcouru plus de 600 km pour se rendre aux Culturales. Grosso modo 1 km par ha d'exploitation. Drôle d'indicateur, on est d'accord. On l'a attrapé au détour d'un passage sur le stand du constructeur de bineuses Garford. Le Gaec a passé commande d'une Robocrop autoguidée par caméra en 6 m, dont 11 éléments à relevage automatique pour gérer les pointes.

- le journaliste : ticket ?

- l'éleveur : 70.000 euros

- le journaliste : ah ouais !

- l'éleveur : c'est le prix d'un pulvérisateur

- le journaliste : certes mais un pulvérisateur, ça fait un peu plus que désherber des céréales !

- l'éleveur : oui mais la bineuse, elle va nous permettre d'intégrer dans la rotation de nouvelles cultures, qui vont conforter notre système d'exploitation, tout en contribuant à amortir la bineuse

- le journaliste : ...

60 porcs, 200 volailles, 2 vaches et 1 bison

Le Gaec Courtoy est atypique à bien des égards. Ses 7 associés exploitent 650 ha répartis à parts égales entre surfaces fourragères et grandes cultures. Ils gèrent quatre ateliers de productions animales, à savoir des vaches allaitantes, des porcs, des volailles et des bisons. Chaque semaine, environ 60 porcs, 200 volailles, 2 vaches et 1 bison sont écoulés à la ferme, dans des magasins de producteurs, sur internet ou encore par le biais de comités d'entreprises. 100 % en vente directe. « Dans le temps, on avait des bouchers qui reconnaissaient et qui valorisaient la qualité de nos produits », explique Manuel Courtoy. « Avec la disparition des bouchers, pour expliquer ce que l'on fait aux consommateurs, il n'y a que la vente directe ».

100 % bio d'ici à 2021

Jusqu'à présent, les porcs et les volailles étaient conduits en conventionnel, les bovins et bisons étant en bio. Depuis le 15 mai dernier, les monogastriques sont en cours de conversion. D'où l'achat de la bineuse. Un défi ? « Le défi est moins technique que commercial », analyse l'éleveur. « En passant au bio, nos viandes seront plus chères. On prend le risque de se détourner d'une partie de la clientèle. La reconstituer pourrait prendre du temps, même si des clients modestes sont prêts à privilégier la qualité sur la quantité. On a aussi un sauve-conduit avec la coopérative Unébio, qui nous garantit l'achat de nos éventuels surplus, à un prix intéressant ».

Vous avez dit flexitarisme ?

Le Gaec est coutumier des prises de risques. En 2009, il investissait dans un méthaniseur, le 7ème au plan national à l'époque. Un deuxième a poussé depuis et un troisième est programmé pour 2020, qui portera la puissance totale à 1.000 MWe, le tout alimenté à près de 90% par les intrants de la ferme. « Ca mange ces bébêtes. Avec les couverts végétaux, on est quasiment rendu à deux cultures par an sur l'ensemble des parcelles ». A propos de « bébêtes » et de « manger », l'évolution des modes de consommation ne jette-t-il pas une ombre à moyen ou long terme sur le système ?

- l'éleveur : moi-même, je mange moins de viande. Mais l'herbe, c'est la seule production que l'on puisse extraire sur la moitié de l'exploitation. Si vous connaissez des gens qui mangent de l'herbe...

- le journaliste : ...