L’accord de libéralisation commerciale UE/Mercosur est signé… Quels impacts potentiels sur les secteurs bovins ?

Le 28 juin dernier, après 20 ans de négociations chaotiques, les représentants du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) et de l’Union Européenne sont parvenu à un accord politique définissant le contenu du futur traité de libre-échange entre le deux blocs. Une fois pleinement entré en vigueur, cet accord supprimerait plus de 90% des droits de douane des deux parties et « ouvrira la plus vaste zone de libre-échange au monde » souligne le Président de la Commission Européenne (en fin de mandat), J-C Junker. Selon la Commission, cela "économiserait aux compagnies européennes plus de 4 milliards € de droits de douane" et leur ouvrirait un accès privilégié à ce marché de 263 millions d'habitants. Tout particulièrement pour les exportations européennes d'automobiles, de produits chimiques et pharmaceutiques, mais aussi de services et en terme d'accès aux marchés publics mercosuriens. Qu'y gagnent ces pays agro-exportateurs ? Un accès à droit nul ou très réduit au marché européen pour toute une série de produits: poulet (180 kt à droit nul!), sucre, éthanol... mais surtout viande bovine. Cela aura à terme, si cet accord est ratifié un impact certain le secteur allaitant. Côté lait, l'impact sera sans doute moindre, comme la taille des contingents. Le GEB vous propose une brève analyse des marchés bovins au Mercosur, le contenu de l’accord et les premiers impacts pressentis, en compléments de la vidéo tournée en avril 2018, qui s'avère malheureusement prémonitoire.

1 - Le Mercosur, déjà le principal fournisseur de viande bovine de l'UE

Les quatre pays du Mercosur sont dans le « top 10 » des exportateurs mondiaux, le Brésil étant redevenu le n°1 mondial l'an passé. En 2018, les quatre principaux membres du Mercosur ont produit environ 13,3 millions de téc, soit un quart de la production mondiale. Sur cette production, environ 3,2 millions de téc ont été exportées, ce qui représente un tiers des échanges mondiaux de viande bovine.

L'Union Européenne est désormais un marché très minoritaire en volume dans l'ensemble des exportations de viandes bovines du Mercosur, surtout depuis l'ouverture du marché chinois. Mais il n'en reste pas moins un marché primordial en valeur. Le Brésil est ainsi le premier fournisseur de l'UE devant l'Uruguay et l'Argentine. Comparativement aux envois à travers le monde où la viande bovine congelée domine, la part de viande réfrigérée est bien plus importante à destination de l'Union Européenne, et croissante depuis quelques années.

Sauf circonstances très particulières, comme fin 2015, la viande bovine produite au Mercosur est systématiquement beaucoup moins chère au stade entrée abattoir qu'en UE.

En moyenne sur 2018, les prix à la production des mâles finis pratiqués aux Brésil (2,12 €/kgéc) et en Argentine (2,17 €/kgéc) était inférieurs de plus de 40% par rapport aux prix du JB R3 européen (3,75 €/kgéc).

Au-delà du différentiel en terme de standard et de coût de production (matériel, main d'œuvre, foncier...), les effets de conversion des monnaies, en particulier depuis 2014 et 2015 avec la dépréciation du peso argentin et du réal brésilien, boostent fortement l'attractivité des viandes du Mercosur sur le marché international.

Plusieurs régimes tarifaires s'appliquent aujourd'hui, avant même l'entrée en vigueur de l'accord UE-Mercosur, à la viande bovine importée en UE depuis le Mercosur (voir tableau)

Aujourd'hui, l'essentiel de la viande bovine (hors préparations) importée en UE entre à droit de douane réduit ou nul. Si la segmentation du contingent Hilton permet de suivre les flux par pays, ce n'est pas le cas pour les contingents « Panel hormone » et GATT. Une estimation a été réalisée à partir des données des opérateurs. Ainsi, hors préparations, on estime que 80 % de la viande bovine expédiée depuis le Mercosur vers l'UE entre via un contingent tarifaire. Il n'y aurait qu'environ 35 à 45 ktéc de viande bovine désossée réfrigérée selon les années à être importée en supportant les droits NPF.

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