Baisse du prix du blé : les céréaliers inquiets pour leur revenu

La ferme France a récolté cette année des blés de très bonne qualité, mais la chute du prix préoccupe les producteurs déjà fragilisés après la moisson catastrophique de 2016.

« La vraie problématique, c'est la baisse des prix », alerte Philippe Pinta, le président de l'AGPB, constatant par ailleurs une « très grande hétérogénéité des rendements » et une « excellente qualité » de la moisson 2017. Ce dernier réalisait un premier bilan après la récolte en présence de la presse, le 29 août.

L'association générale des producteurs de blé (AGPB) a fait ses calculs : « les revenus des céréaliers spécialisés pourraient atteindre difficilement les 2000€/an après déductions des cotisations sociales, avec des prix proches de la moyenne des dix dernières années ». Or, depuis juillet, les prix dévissent, avoisinant dernièrement les 150 €/t rendu Rouen. Les producteurs sont inquiets : l'offre abondante sur le marché mondial et la remontée de la parité €/$ sont deux éléments qui tendent à bloquer la remontée des cours. 

« Il y a des ardoises un peu partout »

La situation est d'autant plus préoccupante que beaucoup de céréaliers comptaient sur la récolte 2017 pour colmater les pertes engendrées par la récolte catastrophique de 2016. « Cela ne peut pas durer, indique Philippe Pinta. Il y a des ardoises un peu partout ». Ce dernier en appelle aux pouvoirs publics. « Il n'y a plus rien à prendre chez les céréaliers », lance-t-il, faisant référence à la mise en place du paiement redistributif et plus récemment au transfert de fonds du 1er vers le 2nd pilier de la PAC. Le président de l'AGPB indique que les exploitations spécialisées en céréales oléo protéagineux (COP) représentent 25 % de la surface agricole française mais ne touchent que 20 % des aides. 

« Travailler la compétitivité »

L'AGPB compte sur les états généraux de l'alimentation et le plan d'investissement promis par Emmanuel Macron pour « travailler la compétitivité de la filière »« Des infrastructures font défaut » concernant le transport ferroviaire et fluvial, signale Philippe Pinta. Sa seule crainte : que ces états généraux se transforment en « Grenelle bis de l'environnement ». Pour développer la filière des céréales, Philippe Pinta croit en la robotique, le numérique, l'irrigation et la sélection génétique. « Les NBT* ne doivent pas être tuées comme les OGM », estime-t-il. Sur le dossier du glyphosate, il regrette « une position très ambigüe de la France », alors que l'Efsa et l'Anses ont rendu leur expertise. « On est en train de basculer du scientifique vers le politique », alerte-t-il. Selon lui, la disparition du glyphosate coûterait 900 millions d'euros aux céréaliers, obligés de revenir au labour.

Du blé de qualité pour regagner des marchés

Si les prix ne sont pas encore au rendez-vous, les céréaliers français pourront quand même compter sur la qualité de leur récolte. « Nous ne devrions pas avoir de problème pour vendre, à nous de regagner des parts de marché, en particulier vers les pays tiers », se réjouit Philippe Pinta. En effet, 85 % des volumes collectés ont une teneur en protéine qui se situe entre 11,5 et 13 %. 

Côté rendement, les dernières estimations font état d'une production de blé tendre de 36,8 millions de tonnes, soit 71,5 quintaux/ha. «La production est en dessous de la moyenne quinquennale, si on enlève l'année 2016 », résume Philippe Pinta. Les résultats sont en réalité très hétérogènes, au sein même des territoires. Cela s'explique par des conditions agroclimatiques particulières : déficit hydrique précoce, gelées tardives de printemps puis canicule et orage. 

*Les New breeding technologies (NBT) sont une technique de sélection végétale.