Blé : la bataille pour l’exportation démarre

La moisson française de blé tendre 2019 s'achève sur une production record et de très bonne qualité. La France doit désormais relever le défi de l'exportation : comment écouler 20 millions de tonnes à l'étranger tout en restant compétitif face à nos concurrents que sont les pays de la Mer Noire ou l'Argentine ? Eléments de réponse avec Michel Portier, directeur général d'Agritel.

Qu'allons-nous faire de tout ce blé ? Avec une récolte quasiment record, c'est la question que sont en mesure de se poser les opérateurs français. Car sur les 39 millions de tonnes (Mt) de blé tendre produites en France cette année, moins de la moitié suffit à notre autonomie alimentaire et couvre nos besoins en alimentation humaine et animale. « Il va falloir être capables d'exporter 20 millions de tonnes », fait savoir Michel Portier, directeur général d'Agritel. Une performance que la France n'a atteinte que trois fois à ce jour. 

Selon les estimations du cabinet de conseil, entre 8 et 9 millions de tonnes pourront être écoulées sur le marché de l'Union européenne. L'Espagne et le Portugal, dont la production de blé a été très diminuée par la sécheresse, devraient être demandeurs et offrir un débouché supplémentaire au blé français. 

Restent plus de 11 millions de tonnes à exporter à l'international. Une quantité qui nécessite que le blé français soit compétitif tout au long de la campagne, au risque de voir ses parts de marché partir au profit de nos plus gros concurrents : la Russie, l'Ukraine ou encore l'Argentine. 

Prix compétitifs

« Aujourd'hui, le blé français est moins cher que le blé russe. On est donc bien placé pour l'export », indique Michel Portier. Agritel estime que la France pourrait exporter cette année 5 Mt vers l'Algérie, 2,2 Mt vers l'Afrique sub-saharienne, 2 Mt vers le Maroc et près de 2 Mt vers les autres destinations habituelles (Cuba, Tunisie, Egypte...). 

La compétition va cependant s'avérer rude, notamment vis-à-vis de l'Ukraine. Le pays a engrangé la meilleure récolte de son histoire (28,2 Mt) et a déjà exporté 3,7 Mt depuis le 1er juillet selon Agritel. De son côté, la France a pour le moment exporté 1,4 Mt de blé. « L'ouverture des importations du Maroc, début novembre, devrait accélérer le mouvement », précise le cabinet. 

En deuxième partie de campagne, il faudra composer avec l'Argentine, dont la récolte de blé est elle aussi prévue à un niveau record (plus de 20 Mt). Le pays, qui traverse actuellement une grave crise politique et économique, a vu sa monnaie dévaluée de plus de 30% depuis le début de l'année. Il sera un concurrent très agressif pour le blé français, notamment sur son marché de prédilection : l'Algérie. Les prochaines élections présidentielles en Argentine, qui auront lieu le 27 octobre 2019, seront scrutées attentivement. « On pense que le nouveau gouvernement argentin pourrait mettre des taxes à l'export, ce qui nous arrangerait bien », concède Michel Portier.