Comment les instituts techniques abordent-ils les nouveaux défis agricoles ?

En février dernier, le ministère de l’Agriculture a validé la qualification d’« Institut technique agricole » de dix-huit organisations de recherche dont celle d’Arvalis. Pour Jacques Mathieu, directeur délégué de cet institut, la ­co-construction des projets est aujourd’hui incontournable.

Perspectives Agricoles : quel est le rôle d'un institut technique ?

Jacques Mathieu : Un institut technique agricole, ou ITA, est le plus souvent une association, parfois un centre technique industriel, porté par des organisations professionnelles syndicales, économiques ou du développement. Il a pour fonction de mobiliser des moyens de recherche appliquée au service des agriculteurs et des acteurs des filières.
Les missions sont donc très opérationnelles avec, comme critère de performance, la capacité à diffuser des références techniques. Les ITA sont structurés par filière. Ils représentent ainsi la diversité des productions. Le lien avec le terrain est donc très fort, d'autant plus qu'une partie significative du financement provient des cotisations interprofessionnelles payées par les producteurs et les filières.

P. A. : Les ITA ont-ils un projet commun ?

J. M. : Les instituts travaillent en filière, mais les thématiques majeures, comme la protection intégrée, l'agriculture biologique ou encore l'environnement, sont de plus en plus transversales. De nombreux travaux impliquent donc une étroite collaboration entre les instituts ; c'est le cas de « Syppre » pour l'étude des systèmes de culture, de ­l'Institut Carnot « Plant2Pro » au service de la compétitivité durable ou encore du consortium de recherche sur le biocontrôle. D'ailleurs, dès la création des premiers instituts techniques à la fin des années 50, une association de coordination, l'ACTA, elle-même reconnue par les pouvoirs publics, a vu le jour.
Elle représente les ITA dans les instances françaises ou européennes et favorise le dialogue entre les instituts afin, entre autres, d'identifier des axes de travail communs.

P. A. : Quel est aujourd'hui le fonctionnement de la recherche ?

J. M.  : Le schéma historique partant de la recherche fondamentale, se poursuivant par la recherche appliquée pour une diffusion, ensuite, par les organismes de développement agricole n'est plus aujourd'hui celui qui prévaut. Les méthodes de travail changent. Elles reposent sur la co-construction des projets avec tous les acteurs de la R&D, et en particulier les agriculteurs, grâce notamment aux nouvelles technologies. Il y a une volonté de valoriser les synergies : à la suite des États Généraux de l'Alimentation, une cellule de coordination entre l'Inra, les ITA et les Chambres d'agriculture a ainsi été proposée.
La recherche de la multiperformance pour les exploitations agricoles, par la création de valeur ajoutée tout en réduisant les pesticides de synthèse, nécessite de trouver de nouveaux leviers d'action et de changer d'échelle. Les travaux portent ainsi, de plus en plus, sur de grandes parcelles, avec une dimension pluriannuelle.

P. A. : Comment Arvalis s'inscrit-il dans ce nouveau schéma ?

J. M.  : Depuis toujours, le lien entre Arvalis et les producteurs de grandes cultures est très marqué. Des commissions régionales d'orientation professionnelle, réunies deux fois par an, et un symposium annuel rassemblent plusieurs centaines de producteurs qui se positionnent sur les objectifs de l'institut. À l'occasion du renouvellement de la qualification d'organisme technique, les experts en charge de l'analyse de la candidature d'Arvalis ont relevé trois atouts majeurs : la réflexion prospective de l'institut sur les attentes sociétales et l'évolution des marchés, son implication dans le domaine du numérique et sa dimension partenariale. Il en ressort notamment une forte capacité fédérative de l'institut, tant en France qu'avec des partenaires étrangers.

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