Guerre en Ukraine : le verdissement de la PAC remis en cause au nom de la souveraineté alimentaire

La souveraineté alimentaire passe-t-elle par la transition écologique, ou nécessite-t-elle de lever le pied sur le verdissement ? Les conséquences de la guerre en Ukraine ravivent le débat sur les conséquences du Pacte vert et de la nouvelle PAC.

Début mars, les ministres européens de l’Agriculture appelaient à « libérer le potentiel de production agricole de l’Europe » et à réévaluer les stratégies communautaires. Simples mesures de court terme pour préserver la sécurité alimentaire mondiale sur un marché temporairement déstabilisé ? Pas sûr. Quelle que soit la durée de cette guerre, ses effets pourraient réorienter durablement la politique européenne.

Alors que la crise atteste du poids pris par la Russie dans l’équilibre alimentaire mondial, le concept de souveraineté alimentaire cesse d’être théorique pour l’Europe. Pour certains dirigeants, cette nouvelle donne disqualifie les stratégies soupçonnées de pouvoir brider le potentiel de production agricole de l’UE. Dans le viseur : la baisse de l’usage des pesticides et des engrais prévue par la stratégie de la Ferme à la table, et l’obligation de préserver 4 % de surfaces non productives de la nouvelle PAC. Une ligne défendue par la FNSEA et endossée par Julien Denormandie mais aussi par Emmanuel Macron, pour qui « la logique de décroissance souhaitée par la stratégie européenne Farm to Fork doit être profondément remise en question. Il faut au contraire produire plus sur notre territoire ».

Cette remise en cause du verdissement a été dénoncée par des ONG environnementales et par la Confédération paysanne, qui voient dans ces propos une « instrumentalisation » de la guerre « pour éteindre toute velléité de transition sociale et écologique du modèle agricole ». Face à ce « dévoiement du concept de souveraineté alimentaire, réduite à un 'produire plus sans contrainte' », la solution réside selon eux dans des régimes alimentaires moins carnés, une place réduite pour les cultures énergétiques et le développement des légumineuses, afin de réduire la dépendance à l’énergie fossile et aux engrais minéraux.