Il faut « accélérer la recherche » sur la viande cultivée en laboratoire, selon des sénateurs

Malgré les réticences des agriculteurs et des responsables politiques, la France devrait « accélérer la recherche » sur la viande reconstituée en laboratoire à partir de cellules animales, recommande un rapport d'information sénatorial publié mercredi.

« Viande in vitro », « viande de laboratoire »... Ces expressions désignent des aliments carnés produits dans des fermenteurs à base de cellules animales plongées dans un bouillon de culture. Pour leurs défenseurs, les « aliments cellulaires » devraient permettre de réduire l'impact de l'élevage, qui représente 14,5% des émissions de gaz à effet de serre d'origine humaine et contribue massivement à la déforestation selon l'ONU.

French paradox

Sur une terre d'élevage comme la France, cette technologie encore balbutiante soulève de nombreuses réticences. L'ancien ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, et l'actuel Marc Fesneau se sont chacun montrés fermement opposés au développement de ces aliments cellulaires. Mais dans le même temps, Bpifrance a soutenu les deux entreprises françaises actives dans ce secteur, Vital Meat et Gourmey, à hauteur d'environ 6 millions d'euros.   

Face à ce paradoxe, les sénateurs reconnaissent avoir été « pour la plupart » sceptiques sur le sujet. Mais à l'issue de leur mission entamée en janvier à l'initiative de la commission des affaires économiques, les rapporteurs Olivier Rietmann (LR) et Henri Cabanel (RDSE) estiment qu'un « consensus s'est dessiné pour accroître nos connaissances sur le sujet ».

INRAE et CNRS sollicités

La mission sénatoriale recommande donc dans son rapport d' « accélérer la recherche en France pour lever les incertitudes encore nombreuses, et pour s'assurer la maîtrise de la technologie ». Ils suggèrent, pour cela, la création d'une unité mixte de recherche au sein de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE) et du CNRS.

Les sénateurs redoutent en effet que la France ne se laisse distancer, et tombe « dans la dépendance à de grandes entreprises étrangères ». Ils recommandent donc de « ne pas exclure, par principe, le financement de l'innovation », par des subventions publiques notamment.

Aucune demande de mise sur le marché n'a encore été effectuée dans l'Union européenne, et il faudra vraisemblablement attendre au moins 2025 pour voir de tels aliments apparaître en rayons. Pour autant, cela ne doit pas être « un prétexte pour faire comme si le sujet n'existait pas », relèvent-ils. Outre Israël ou Singapour, où du « poulet » cellulaire est déjà commercialisé, des pays européens comme les Pays-Bas ou le Danemark parient eux-aussi sur la croissance de ce marché.