L’herbe : une nourriture à bas niveau d’émission de gaz à effet de serre

Si les ruminants émettent des gaz à effet de serre, la prairie stocke 700 kg de carbone par hectare et par an, et compense une large partie des émissions de méthane.

Bovins de boucherie – Alors que de nombreux observateurs constatent un recul permanent de l’élevage, le troupeau allaitant français reste le premier de l’UE devant l’Allemagne et l’Irlande. C’est également le cas pour le troupeau laitier. Les exploitations bovines sont très liées au sol et les bovins présentent, comme tous les ruminants, la particularité unique de valoriser l’herbe et les fourrages fibreux pour les transformer en lait et en viande. Les élevages français sont très autonomes et produisent en moyenne 90% de l’alimentation du troupeau. L’herbe constitue 65% de la ration et peut aller jusqu’à 90% dans les systèmes allaitants très herbagers.

Alors que la pensée verte et environnementale note toujours l’impact des activités humaines sur le réchauffement de la planète et que les ruminants sont pointés du doigt pour leurs émissions de méthane, il est bon de rappeler que les prairies, associées à l’élevage, sont reconnues pour leur rôle essentiel de régulation écologique. Les pâturages permanents représentent environ 1/3 de la surface agricole utile (SAU) française. Avec les surfaces fourragères, elles occupent près de 50% de la SAU. Si les ruminants émettent des gaz à effet de serre, la prairie stocke 700 kg de carbone par hectare et par an, et compense une large partie des émissions de méthane. La prairie pâturée permet de valoriser les surfaces les moins faciles à cultiver, et joue un rôle essentiel dans la ressource en eau. Associée aux haies, elle entretient la biodiversité et contribue à la qualité des paysages.

Même si l’utilisation du maïs est indispensable pour pallier les périodes où les herbages ne sont plus accessibles ou sous-productifs, il faut que les détracteurs de la viande reconnaissent la spécificité de l’élevage français. La valorisation de l’herbe est d’autant plus intéressante qu’elle amoindrit les coûts de production. Néanmoins la finition des animaux doit faire appel à des aliments plus énergétiques que sont les céréales avec une correction azotée.

La composition du troupeau laitier est dominée par la race Prim’Holstein. La France a la chance de détenir une très grande variété de races allaitantes dont l’essentiel de la production est assuré par 5 races : Charolaise, Limousine, Blonde d’Aquitaine, Aubrac et Salers. Notre pays a conservé une diversité génétique remarquable et fait partie des leaders mondiaux en génétique animale. Ces races ont une très belle image auprès de la population, avec un relais très fort sur les grands salons, les concours d’animaux de boucherie ou dans la communication interprofessionnelle sur « les viandes racées ».

Pendant de très longues années, la production de viande a été sous valorisée, mettant le revenu des éleveurs allaitants au bas de l’échelle. Maintenir un prix bas de l’alimentation a toujours été une préoccupation par des décideurs politiques. C’est dans ce sens qu’ont été montées les nombreuses politiques européennes, qui compensaient cette non-évolution des prix par des primes. Aucune ferme ne pourrait aujourd’hui se passer des aides de l’UE. Or, ce système a atteint ses limites, car il a recouvert des enjeux environnementaux ou géopolitiques qui desservent les éleveurs en accumulant les contraintes techniques et administratives. Faute de trouver un revenu décent, et accablés par des années de sécheresse et de pression tarifaire, de nombreux éleveurs ont jeté l’éponge et cela se poursuit. Les installations sont très loin de compenser une pyramide des âges qui projette de nombreux départs à la retraite. La conséquence est une décheptellisation massive qui inquiète sérieusement l’ensemble de la filière aval.

Le spectre d’une France qui ne serait plus autosuffisante en viande est affiché. Les industriels cherchent de plus en plus à sécuriser leurs approvisionnements, les métiers du négoce se concentrent pour écraser les charges, et les éleveurs ne sortent toujours pas la tête de l’eau malgré une revalorisation marquée des prix de la viande depuis un an. La filière viande est en pleine mutation, et une chose est sûre, la viande est un produit noble qui ne doit plus être dévoyé sur l’autel de la sauvegarde de la planète.