La ferme connectée devient incontournable

La troisième édition des rencontres nationales du numérique et de l’innovation à la ferme s’est déroulée à Aurillac, mardi 9 novembre. Le débat s’est ouvert sur l’intérêt des nouveaux outils.

L e parallèle est facile :  Ruralitic (organisé dans le Cantal en été) vise l’attractivité des territoires ruraux grâce au numérique ; le Smartagri forum (également dans le département, mais à l’automne) entend promouvoir les outils connectés sur les exploitations agricoles, là encore pour rester attractif, mais plus précisément dans le métier d’agriculteur.
Sébastien Côte, le coordinateur de la dernière session - qui s’est tenue à Aurillac le 9 novembre - a livré en introduction les résultats d’une enquête : 97 % des exploitants interrogés estiment que l’innovation doit servir d’abord la valeur ajoutée ; 92 % pensent aussi que c’est un moyen de gagner du temps libre pour la famille et les loisirs. Finalement, ils ne sont “que” 76 % à rechercher davantage de rendement grâce à ces outils. Chantal Cor, première vice-présidente de la Chambre d’agriculture, avance une explication : “Plutôt que du rendement, on recherche surtout à optimiser.” Et afin de lever toute ambigüité, Joël Piganiol, président de la FDSEA, de préciser que faire évoluer les pratiques ne remplacera en aucun cas “le rapport à l’animal, le feeling propre à l’éleveur lié à la personne et à l’expérience”.
La deuxième révolution technique
“Toutes les générations, même celles qui ne sont pas nées avec un smartphone entre les mains, sont intéressées par le progrès”, affirme Chantal Cor. Elle rappelle que les éleveurs laitiers ont été parmi les premiers à recevoir par message électronique les analyses de lait, permettant de gérer l’alimentation des vaches plus finement en fonction des résultats et de manière très réactive. Ensuite, la déclaration du veau au moment du vêlage s’est avérée un gain de temps appréciable qui, de surcroît, limite les risques d’erreur. Christophe Vidal, conseiller départemental et lui-même agriculteur, apporte son témoignage sur les nouveaux outils qui se développent pour l’élevage, comme les détections de chaleur ou de gestation qu’il utilise sur son exploitation : “Le suivi du cheptel à distance me donne plus de sérénité lors des déplacements liés à mon mandat.” Jean-Noël Fau, des JA du Cantal, compare cette révolution technologique à celle qu’a connue la génération de ses grands-parents “lorsqu’elle est passée des bœufs au tracteur”. Pour connaître ces outils du XXIe siècle et leurs performances, il fait confiance à la Chambre d’agriculture. “C’est le premier moyen de s’informer sur les outils modernes, mais il est utile aussi de consulter la presse spécialisée ou d’aller sur des salons agricoles pour des démonstrations.”
Innover pour être plus vertueux
Par exemple, la chambre d’agriculture du Cantal propose des journées techniques sur des parcelles d’essais avec des herbomètres connectés (gestion de pâture) ou des sondes connectées pour mesurer le taux d’humidité tous les 10 cm du sol dans une culture de maïs. De quoi garantir une gestion
raisonnée de l’eau. En clair, faire entrer l’innovation à la ferme peut aussi servir à devenir encore plus vertueux, souligne Chantal Cor qui est, par ailleurs, présidente des irriguants du Cantal. Mais que les nouveaux outils servent une exploitation ou un collectif, il reste à lever  la question de l’investissement.
Le nerf de la guerre
Depuis Paris, en visio, Catherine Bureau, directrice déléguée de la Fondation Avril(1), a rappelé que des appels à projets auprès de jeunes ingénieurs permettaient de faire avancer la recherche grâce à des dotations d’État et le cumul de compétences. Une fois sur le marché, chaque outil devrait pouvoir bénéficier d’une aide à l’investissement, défend Joël Piganiol. Christophe Vidal convient qu’être à l’écoute  des agriculteurs pour accompagner les évolutions est bien du ressort des
collectivités locales, afin de contribuer au “mieux vivre”. Face aux BTS Acse du lycée agricole qui assistaient à cette table ronde, l’élu départemental insiste aussi sur la nécessité d’être bien formé.
Reste une mise en garde : la vigilance quant aux données fournies et qui alimentent les fameux “big data”. Si les données globales servent à faire évoluer les demandes dans le bon sens et offrent des statistiques fiables sur la ferme Cantal ou la ferme France, elles ne doivent pas tomber dans les mains de privés peu scrupuleux, “capables de revendre des données que l’on a parfois soi-même rentrées”, redoutent les participants du débat.

(1) Reconnue d’utilité publique, elle a notamment pour objet la revitalisation des campagnes par l’amélioration de la situation économique des producteurs.