La flambée des énergies fragilise les industriels

Comme dans beaucoup de secteurs d’activité, les entreprises de transformation de la viande ou du lait sont fortement touchées par l’embrasement du prix des énergies, notamment celle de l’électricité.

Bovins de boucherie – Le secteur agroalimentaire représente 57% de la consommation industrielle nationale d’électricité consacrée à la production de froid. La production frigorifique mobilise, selon le niveau d’activité et l’espèce, entre 50 et 70% du total de la consommation électrique des outils d’abattage-découpe-transformation. Sans courant, pas de froid et sans froid, pas d’activité possible. Les factures s’envolent au point de remettre en cause la viabilité de certaines entreprises. L’avenir est déjà compromis pour les plus fragiles. Dans une filière tous les maillons sont importants, car ils sont tous dépendants les uns des autres.

La chasse au gaspi est lancée et des investissements lourds sont programmés pour faire baisser la consommation de gaz ou d’électricité. L’appel aux énergies renouvelables est intéressant, mais le gros des économies passe par une maintenance accrue des groupes froids et de leurs rénovations.

La répercussion de ces hausses de charge sur le consommateur est compliquée dans un contexte social déjà tendu. Le dernier maillon de la chaîne ne pourra absorber l’ensemble des hausses, notamment à l’approche de l’hiver. L’Etat aide, mais ne peut pas tout contraindre. L’économie dans son ensemble va souffrir, car quand les premiers dépôts de bilan énergétique vont apparaître, les conséquences seront immenses pour la production. 

La fin septembre et le mois d’octobre sont toujours des périodes tendues en termes de consommation avec des budgets qui ont été impactés par la rentrée scolaire, mais surtout par la forte progression des charges des ménages avec l’énergie en tête. Face à ce mouvement de décroissance de la consommation, ce sont les disponibilités dans les campagnes qui s’amoindrissent sérieusement. Sur les 4 dernières semaines, les volumes abattus sont à la baisse de 2000 animaux par semaine par rapport à l’an dernier. Dans son intervention lors du congrès de « Culture viande », Gilles GAUTHIER, son président, rappelait que l’offre nationale des troupeaux laitiers et allaitants s’est amenuisée de plus de 10% depuis 2016 (-750 000 têtes en 6 ans). En dépit d’une très sensible revalorisation du prix des animaux, la production continue de s’abaisser à un rythme inquiétant de près de 3% par mois. "La conséquence pour nos abattoirs est sévère, avec une réduction d’activité de 6 à 8%, et plus grave encore, l’approvisionnement en viande de nos clients et donc des consommateurs risque dans les prochains mois de ne plus être assuré, ouvrant encore un champ plus large aux importations." Les viandes bovines importées représentaient déjà sur le premier semestre 2022 entre 25 et 26% du marché.  Les prospectives de décrochage de la production allaitante selon la FNB sont -600 000 animaux d’ici 2030. Ce recul drastique de l’offre incite fortement les industriels à une contractualisation des achats pour sécuriser leurs approvisionnements, mais les éleveurs restent réticents sur un marché où la vente de leurs animaux n’est plus un problème.

Les disponibilités pour les prochaines semaines seront faibles, avec des éleveurs qui ont plus vendu pendant la période de sécheresse et qui profitent du reverdissement des prairies. Les engraisseurs spécialisés, qui ont été fortement sollicités pour la rentrée, ont moins de stocks et peinent à assurer leurs rotations, faute d’offre suffisante. De nombreux éleveurs profitent des tarifs attractifs dans la viande pour vendre leurs animaux à peine finis aux abattoirs plutôt que dans le maigre.