La pulvérisation du vignoble par drone livre son verdict

Selon l’IFV, la qualité de pulvérisation du drone est généralement inférieure aux références terrestres mais la technique est pertinente pour les 5000 ha de vignes en forte pente. Son sort réglementaire est entre les mains de l’Anses.

Quelle efficacité biologique ? Quel risque de dérive ? Quels bénéfices pour les opérateurs en comparaison des applications au sol réalisées au moyen d’un atomiseur à dos ou d’un chenillard dans les vignobles en forte pente (30% et plus) ? Telles étaient les trois principales questions auxquelles le projet Pulvédrone devait répondre. Porté par l’IFV, le projet expérimental est né de la loi Egalim et visait à étudier une alternative à l’interdiction des traitements aériens décrétée en 2015. Ce sont plus 57 essais qui ont été menés durant trois campagnes (2019 à 2021), dont 25 en vignobles, 14 sur EvaSprayViti et 18 sur EoleDrift, les deux bancs d’essai de l’Inrae destinés à mesurer la dérive.

Premier enseignement de l’IFV : le drone permet un très bon respect des consignes de pulvérisation : débit, vitesse, trajectoire. L’électronique embarquée sur les drones permet aussi l’enregistrement du plan de vol et des débits. La maîtrise de la hauteur de vol reste un point de vigilance selon la technologie embarquée.

L’autonomie du drone en termes de batterie (15 à 20 minutes de vol maximum) ainsi que le volume de bouillie emporté restent limités. Dans les vignobles non mécanisables, en forte pente, le débit de chantier du drone est malgré tout intéressant, entre 1 et 2 heures par hectare selon la configuration de la parcelle.

Efficacité biologique

En début de végétation, la qualité de pulvérisation est satisfaisante (avant floraison). Aux stades de végétation plus avancés, la qualité de pulvérisation du drone est généralement inférieure aux références terrestres. On observe un gradient de dépôts haut-bas et des difficultés à atteindre le cœur de la végétation et les zones de grappes, et des dépôts plus faibles sur la face inférieure des feuilles. Sur mode de conduite en gobelet (port étalé), la qualité est jugée satisfaisante. Les quelques essais biologiques menés ont apporté des résultats contrastés suivant les contextes de pression maladie. Selon l’IFV, l’expérience plus ancienne des vignobles suisses a montré qu’en cas de forte pression sanitaire des traitements complémentaires au sol en encadrement de floraison sont nécessaires pour assurer un niveau de protection satisfaisant. L’ITV estime que des essais complémentaires seront utiles pour mieux définir les conditions d’utilisation du drone selon les caractéristiques de différents vignobles et les modes de production.

Peu de dérive, peu d’exposition des opérateurs

Le risque de dérive est limité du fait que le flux d’air du drone plaque la pulvérisation vers le sol et peut être encore amoindri par l’utilisation de buses antidérives (86% de réduction avec buses antidérive par rapport à des buses à fentes classiques) et par une hauteur de vol plus faible. Selon l’IFV, les avantages du drone par rapport aux applications au sol (atomiseur à dos, chenillard) sont très nets sur la réduction de l’exposition des opérateurs (le télépilote est 300 à 600 fois moins exposé que l’opérateur au sol lors du traitement) et sur La réduction de la pénibilité du travail et les risques d’accidents. L’intégration de la pulvérisation par drone dans l’organisation de l’exploitation doit être pensée et adaptée : installation d’aire de décollage/atterrissage, dispositif de rétention mobile, dispositif de remplissage à partir d’une cuve mobile, repérage des parcelles et identification des risques, formation des opérateurs…

Dans l’attente de l’avis de l’Anses

Le sort de la pulvérisation par drone est désormais entre les mains l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), qui doit rendre un avis d’ici à la fin de l’année. En Europe, la Suisse et l’Autriche font partie des pays ayant autorisé la pulvérisation par drone. Au sein de l’UE, la révision en cours de la directive européenne SUD 2009/128/CE en cours pourra à moyen terme redéfinir le cadre réglementaire européen sur l’interdiction des traitements aériens.

Selon l’IFV, les vignerons exploitant des vignes en pentes sont en forte attente d’une évolution de la réglementation. Ces zones représentent des surfaces d’environ 5000 ha en France dont 900 ha en Alsace, 800 ha en Côtes du Rhône septentrionales, 800 ha en Beaujolais.