Les industriels vont devoir composer avec moins de vaches, dans un contexte dégradé

L’effondrement de l’offre, la hausse de l’énergie, des matières premières (carton, barquette, CO2…) et la dégradation de la valorisation du 5e quartier et des coproduits sont plus qu’inquiétantes pour les entreprises d’abattage et de transformation.

Conjoncture –  Dans un contexte économique compliqué, les industriels de la viande ont de plus en plus de mal à anticiper les effets de la décapitalisation. En dix ans, la France a perdu 9% des vaches Prim‘Holsteins et Montbéliardes, 17% de Charolaises, 13% de Blondes d’Aquitaine, et 30% de Normandes. Dans le même temps, les races rustiques ont vu leurs effectifs progresser de 5% en Salers et 48% en Aubracs. Les volumes traités par les industriels de la viande ont bénéficié de cette décapitalisation, pour tenir des prix bas et répondre aux exigences des distributeurs. Tout le monde s’accordait sur le dos des éleveurs, renforçant ainsi ce cercle vicieux. Or, l’équilibre du marché a changé de main, avec des volumes de viande française qui seront de moins en moins en adéquation avec les besoins du marché. Les importations seront désormais incontournables, avec des acteurs qui ne jouent plus le VBF. Les industriels ont également vu s’envoler le prix des énergies dont ils sont hyperdépendants. La hausse des matières premières (carton, barquette, CO2…) et la dégradation de la valorisation du 5e quartier et des coproduits sont plus qu’inquiétantes, car ce sont ces entreprises qui risquent de payer un lourd tribut à cette guerre économique. L’État aura-t-il la volonté et les moyens pour accompagner cette décroissance pour éviter une hécatombe, en matière de faillite et d’emploi ? 

Dans ce panorama peu reluisant, il y a pourtant des hommes et des femmes qui se battent pour relever tous ces défis et proposer des produits de qualité à un consommateur en plein questionnement et soumis à des contraintes économiques drastiques.   

Faire correspondre l’offre à une demande en pleine évolution avec des budgets comprimés est compliqué. La base de travail reste une vache avec ses multiples morceaux. Faire entrer 55 ou 60% de ces pièces dans le hachoir est un défi économique souvent insurmontable. Les négociations commerciales qui vont reprendre entre les industriels et les distributeurs seront une nouvelle fois très rudes avec une volonté des distributeurs (soutenus par l’Etat) de faire baisser le prix des produits. Dans l’état actuel de santé des entreprises d’abattage, de transformation, de négoce ou de l’élevage français, c’est impossible. La valorisation de la viande ne peut passer que par le steak haché qui est le seul produit indispensable aux familles. Les viandes de qualité souffrent face à des coûts de production élevés, et des tarifs peu attrayants sur les étals. Malgré une communication active sur les races à viande, la consommation domestique s’érode au profit des ventes dans la RHD (importée). Alors qu’en pleine crise covid, une grande partie des viandes dédiées aux fast-foods ou à la restauration spécialisée en viande était d’origine française avec une volonté d’afficher une bonne image auprès des éleveurs et des consommateurs ; aujourd’hui, la guerre économique se fait autour du minerai, avec des enseignes qui ne jouent plus le jeu malgré l’image qu’elle diffuse.