« Naturalité et clean label dominent partout »

<strong>Dirigeant du laboratoire d’essai des matériels et des produits alimentaire (Lempa) basé à Rouen, Pierre-Tristan Fleury nous présente les grandes tendances actuelles en Boulangerie-Viennoiserie-Pâtisserie (BVP).</strong>

La Dépêche-Le Petit Meunier: Quelle tendance observez-vous en termes de demandes de vos clients par rapport aux années précédentes, au niveau matières premières et process?

Pierre-Tristan Fleury : Plusieurs grandes tendances se dessinent actuellement dans la BVP. En toile de fond, le principe de naturalité et de clean label domine partout avec comme outil prédominant le nutri-score. En meunerie, cela se manifeste par l’abandon progressif des correcteurs et du gluten pour s’intéresser davantage à la qualité des blés et à ce qu’ils peuvent apporter comme particularités technologiques spécifiques à la farine. La place des blés anciens et des légumineuses augmente. On observe le « retour » de l’usage des graines. Réglementairement, la diminution du sel dans le pain interpelle, les pouvoirs publics ayant perdu patience sur ce point. Le travail des fermentations est une tendance croissante avec l’usage des levains et l’intérêt émergent pour le microbiote. Ces sujets sont naturellement abordés dans notre offre de formation. La signature d’une convention nationale d’objectif avec la caisse nationale d’assurance maladie pour quatre ans nourrit la réflexion sur la santé des boulangers-pâtissiers. La pulvérulence des farines et des enzymes fait débat. Raison pour laquelle nous avons lancé des projets de recherches dédiés depuis trois ans et proposons la mesure de l’indice de pulvérulence des farines et correcteurs ainsi que le contrôle des nouvelles machines en BVP.

LD-LPM: Comment les entreprises de transformation des céréales peuvent-elles valoriser davantage leurs produits?

P.-T. F. : Il existe une batterie de leviers pour valoriser nos métiers. Les acteurs font preuve d’inventivité à tous niveaux. Certains diront que les choses sont plus complexes qu’il y a vingt ans. Pour ma part je le vois différemment. Si le pain n’a jamais été aussi bon et divers aujourd’hui, c’est bien parce que nous avons pris conscience de la richesse et du côté technologique de nos métiers. Et que nous commençons, enfin, à le faire savoir. Il reste un fossé abyssal entre l’image perçue et la réalité de notre filière. Lorsque je dis que je suis biochimiste et meunier, mon entourage continue de m’imaginer assis sur un sac de blé au pied des ailles d’un moulin. C’est dire le travail d’explication à faire pour renvoyer une image de filière moderne, riche, attractive et créatrice d’emploi.

LD-LPM: Votre activité a-t-elle fait les frais de la pandémie de Covid-19? Si oui, dans quelle mesure?

P.-T. F. : Comme pour toutes les entreprises françaises, la situation sanitaire de notre pays et du monde préoccupe. Elle bouscule les habitudes, mais permet aussi de se réinventer et stimule l’esprit. Un profond regret cependant, elle met malheureusement en exergue l’impossibilité du monde à répondre de manière harmonisée à une crise qui touche pourtant tout le monde.