[Med’Agri] J-7 pour la ré-homologation du cuivre

Le vote des États membres de l’UE est attendu pour le 23 ou 24 octobre. La Commission européenne propose une ré-homologation pour 7 ans, à raison de 4 kg/an, avec lissage possible pour les cultures pérennes.

« La Commission européenne propose une ré-homologation pour 7 ans, à raison de 4 kg/ha/an, avec lissage possible et limité aux cultures pérennes ». Telle est l'annonce faite par Jean-Claude Malet, du Service régional de l'alimentation (DRAL PACA), qui intervenait à Med'Agri dans le cadre d'une conférence consacrée aux solutions de réduction d'usage et de substitution au cuivre. « La balle est dans le camp des États membres, le vote étant programmé pour le 23 ou 24 octobre prochain ». Pour rappel, le cuivre est aujourd'hui homologué à la dose de 6 kg/ha/an, avec un lissage sur 5 ans. C'est donc à une réduction de dose de 33 % que les viticulteurs, bio ou pas, vont devoir faire face. En France, en viticulture biologique, l'utilisation de cuivre est d'environ 5 kg/ha/an en année à forte pression de mildiou (soit environ un an sur deux) contre 3 kg/ha/an en année de faible pression maladie. Le processus de ré-homologation coïncide avec une année très critique. « Les attaques ont été particulièrement sévères et ont perduré pendant plusieurs mois à la faveur de conditions météorologiques très favorables à la maladie », souligne Nicolas Aveline, ingénieur à la station IFV de Bordeaux. « En agriculture biologique, les solutions alternatives restent, en l'état actuel de nos connaissances et de nos outils, insuffisantes pour suppléer le cuivre dans en cas de fortes attaques ».

Un produit toxique

Si la proposition de la Commission est potentiellement problématique les années à fortes attaques comme 2018, la possibilité de lisser les doses sur 5 ans, en cultures pérennes, demeure un sauf-conduit, certes imparfait mais bienvenu. Avec une inconnue à ce jour : la dose maxi utilisable l'année à très forte pression. Pour voir la cuve à moitié pleine, il suffit de se tourner vers des pays comme le Danemark et les Pays-Bas ont d'ores et déjà banni le cuivre de leur catalogue de produits de protection des plantes. Le cuivre n'est pas une substance anodine. Des concentrations excédentaires en cuivre ont des effets écotoxicologiques (risques avérés pour les populations microbiennes du sol, les vers de terre, certains organismes aquatiques et des auxiliaires des cultures) et phytotoxiques reconnus sur la croissance et le développement de la plupart des plantes. Ils se manifestent notamment par des chloroses et une réduction de la biomasse totale. Le cuivre a aussi des effets sur les opérateurs en cas d'inhalation ou de pénétration percutanée. Son caractère toxique et persistant place le cuivre sur la liste des substances à substitution, l'exposant de fait au processus récurrent de ré-homologation.

Moduler les doses, varier les moyens de lutte

Le cuivre est depuis plus de 130 ans (1886) une matière active dont l'efficacité contre le mildiou de la vigne n'a jamais été prise en défaut, même si son mode d'action relève toujours d'hypothèses : fuite d'électrolytes cellulaires, perturbation de la balance osmotique, chélation par les sites actifs de certaines protéines, génération d'un stress oxydant. Depuis 1985, date officielle de naissance de l'agriculture biologique, le cuivre est la matière active indispensable pour maîtriser le mildiou en bio, sans générer de résistance. La quête de solutions complémentaires et alternatives s'intensifie depuis quelques années. Elles reposent sur la prophylaxie (gestion du microclimat grâce à la taille et l'élimination des litières infectées par ramassage), le recours à des outils d'aide à la décision pour choisir au mieux les doses et les dates d'intervention, sur l'amélioration de la qualité d'application (face par face, panneaux récupérateurs). Autre piste de travail : l'usage de produits alternatifs relevant du biocontrôle (biocides, stimulateurs de défense des plantes), de préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP) ou encore d'huiles essentielles. Autant de produits plus ou moins efficaces,  mais systématiquement au-dessous du niveau du cuivre. Des moyens physiques tels que des tunnels amovibles ou le recours à des rayonnements UV font également l'objet de tests. On n'oublie pas les cépages résistants, très prometteurs mais à l'échéance encore lointaine. « On ne peut pas dissocier les méthodes de lutte du couple viticulteur / exploitation », souligne Marc Chovelon, expérimentateur en viticulture bio au sein du GRAB. « Les objectifs de production, la connaissance du vignoble ou encore la notion de prise de risque sont susceptibles d'orienter la stratégie de lutte. Un jeune agriculteur endetté n'aura pas la même stratégie qu'un vigneron en bio depuis 30 ans ».