Bœuf canadien : avec ou sans farines animales ?

Pendant que le ministre de l’Agriculture affirme que l’alimentation des bovins canadiens est indemne de farines animales, le quotidien Le Monde avance, textes à l’appui, que les farines de sang et la gélatine peuvent y être incorporées, sans que la législation n’y trouve rien à redire.

« Pour l'import de viande bovine, ça concerne 23 fermes au Canada, il n'y a aucune possibilité d'importer des animaux traités aux hormones, d'importer des animaux qui auront mangé des farines animales, c'est dans le texte ». Telle était l'affirmation de Didier Guillaume, dans le rendez-vous politique matinale « les 4 vérités » lundi 22 juillet sur France 2. Une déclaration corroborée par le site gouvernemental français dédié au Ceta, selon lequel « la réglementation européenne reste inchangée depuis l'entrée en vigueur provisoire du Ceta : les farines animales ne seront pas autorisées de nouveau dans l'alimentation des bovins en Europe à la suite de la ratification du Ceta. L'importation de viande issue de bovins nourris aux farines animales est interdite. En somme, pas de changement pour le consommateur européen ». 

Des trous dans la réglementation

Le quotidien Le Monde, qui s'est penché sur les textes, n'arrive pas à la même conclusion. « En épluchant les réglementations vétérinaires canadiennes et européennes avec l'aide d'experts, une conclusion finit par se dessiner : les pouvoirs publics se sont trompés en jurant que l'interdiction des farines animales était absolue », écrit le journal sur son site. « Un trou dans la législation autorise en fait les éleveurs canadiens à nourrir leurs bœufs avec des farines produites à partir de ce qu'il reste de leurs congénères une fois découpés à l'abattoir – le sang, les poils, le gras – et à les envoyer sur le sol européen sans que le consommateur en soit informé ». Au passage, le quotidien bat aussi en brèche l'idée selon laquelle les normes sanitaires applicables sur le sol européen s'appliqueraient de facto aux produits importés. « Les règles applicables à l'importation sont généralement définies à part, avec des « clauses miroirs », qui peuvent parfois être moins exigeantes, pour ne pas contrevenir aux grands principes de l'Organisation mondiale du commerce », relève le quotidien.

La Canada, pas épargné par l'ESB

Toujours selon Le Monde, en écartant la moelle épinière et en chauffant les restes bovins à très haute température, les fabricants éliminent tout risque de transmission des maladies comme l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), la maladie de la « vache folle ». Il faut dire que la filière bovine canadienne a payé un lourd tribu suite à la détection de la maladie en 2003, ce dont elle ne s'est jamais totalement remise. Le Ceta et son contingent de 48 840 t équivalent carcasse de viande de bœuf (et 75 000 tonnes de porc) constituent un débouché bienvenu, même si celui-ci n'est pas dénué de contraintes. Aux charges supplémentaires d'inspection sanitaire et d'administration s'ajoutent les surcoût liés à l'alimentation, l'interdiction des hormones allongeant la durée d'élevage de 17-20 mois à 24-28 mois, soit deux hivers au cours desquels les animaux ne prennent pas de poids. Le gouvernement apportera-t-il des éléments de réponse quant aux farines de sang et à la gélatine ? Réponse à l'Assemblée nationale ce mardi 23 juillet avec le vote portant sur la ratification du traité de libre-échange.