Démarrage de la bioraffinerie de Total à La Mède

La raffinerie de biocarburants de Total à La Mède (Bouches-du-Rhône), l'une des plus grandes d'Europe, a démarré sa production, a annoncé le géant pétrolier le 3 juillet. Elle traitera chaque année "au minimum 50 000 tonnes de colza français".

Le site du bord de l'étang de Berre, près de Marseille, issu de la conversion d'une raffinerie d'hydrocarbures, dispose d'une capacité de production annuelle de 500 000 tonnes de biocarburants, du "biodiesel" et du "biojet" pour l'aviation, a expliqué Total dans un communiqué publié le 3 juillet. La bioraffinerie, une des plus grandes du continent avec celles d'Eni en Italie et de Neste en Finlande, est la première de cette taille en France.

Total avait lancé en 2015, en liaison avec le gouvernement, la conversion de sa raffinerie de pétrole brut, alors pourvoyeuse de 430 emplois mais largement déficitaire dans un contexte de surcapacités européennes. Le groupe indique avoir investi 275 millions d'euros. Et l'ensemble des nouvelles activités - bioraffinerie mais aussi une plateforme de logistique ou encore un centre de formation - permet de maintenir 250 emplois directs. 

Mais le démarrage n'est pas allé sans mal, avec près d'un an de retard, pour des "raisons techniques" liées à la "transformation d'installations existantes". La Mède, qui fonctionnera pour moitié sur la transformation d'huile de palme importée, a aussi fait face à une vive contestation des défenseurs de l'environnement et des agriculteurs, pour une fois unis sur un même front.

300 000 tonnes d'huile de palme

Des agriculteurs étaient venus bloquer le site de La Mède en juin 2018, protestant contre l'importation des matières premières et notamment de l'huile de palme "dont la part croît" dans l'essence en France au détriment notamment du colza. Total s'est engagé à employer "au minimum 50 000 tonnes de colza français afin d'assurer un débouché supplémentaire à l'agriculture française". Le groupe assure aussi s'être "engagé à traiter chaque année au maximum 300 000 tonnes d'huile de palme, soit moins de 50% du volume des matières premières nécessaires".

Les associations environnementales, qui contestent devant la justice administrative l'autorisation d'exploitation accordée par le préfet (audience attendue début 2020), sont vent debout contre un projet accusé de contribuer à la déforestation en Asie du sud-est. Dans son communiqué de presse, Total indique que les carburants seront produits "pour 60-70% à partir d'huiles végétales durables (colza, palme, tournesol, etc.)" et "pour 30-40% à partir de retraitement de déchets (graisses animales, huiles de cuisson, etc.)". Le groupe a assuré compléter la certification de son huile de palme par un dispositif spécial de contrôle de la durabilité et du respect des droits de l'Homme (limitation du nombre de fournisseurs, acceptant d'être audités par un expert tiers...). Mais les ONG, telles que Greenpeace et les Amis de la Terre, demandent plus de transparence sur les origines géographiques, les noms des fermes plutôt que des moulins (où arrivent des fruits de toutes origines), dénoncent l'inefficacité de certifications comme les labels RSPO ou ISCC.

L'essentiel de la production de biocarburants ira au marché national. La France consomme environ trois millions de tonnes par an de biodiesels, incorporés à hauteur de 7,7% dans les hydrocarbures. Jusqu'ici, environ la moitié était produite en France.