États généraux : « Leclerc cherche à faire peur pour que rien ne change »

Plusieurs pistes commencent à émerger des débats, notamment celle d'un contrat qui respecte le prix de revient des agriculteurs. Mais le ton est monté d’un cran entre Leclerc qui brandit la menace d’une hausse des prix pour le consommateur et les protagonistes des états généraux.

« C'est un mensonge » lance Serge Papin, le président de Système U, réagissant aux propos tenus par Michel Édouard Leclerc sur son blog. Ce dernier a brandi la menace de hausses de prix « de 5 à 15 % sur des milliers d'articles alimentaires », suite aux états généraux de l'alimentation. 

« Je n'ai jamais travaillé, avec mon atelier, sur des augmentations de prix concernant des produits de grande consommation. On a simplement trouvé une nouvelle façon de passer des conventions avec le monde agricole », se défend Serge Papin. Ce dernier a en effet été chargé de co-présider un atelier des états généraux, qui vient d'aboutir sur un accord pour une nouvelle forme de contractualisation entre producteurs, transformateurs et distributeurs.

Lors d'une table ronde organisée aujourd'hui par les Chambres d'agriculture (APCA), Serge Papin n'a pas été le seul à s'insurger contre l'attitude de Michel Édouard Leclerc. « Je condamne ces propos outranciers », surenchérit Guillaume Garot, député de la Mayenne. « Leclerc cherche à faire peur pour que rien ne change. Il faut dénoncer cela », ajoute-t-il.

Ce qui doit changer, c'est précisément la répartition de la valeur au sein des filières, afin que le producteur ne soit plus la variable d'ajustement. « On a vraiment voulu s'attacher à réconcilier », explique Serge Papin. Selon le président de Système U, la loi de modernisation de l'économie (LME) « a favorisé la loi du plus fort et la guerre des prix ». « Le Nutella est subventionné par la pomme Royal Gala. Voilà l'injustice que connaît le monde agricole », illustre-t-il. Selon lui, la marge réalisée sur une pomme est de 36 %, contre 3,49 % sur un pot de pâte à tartiner. « La rentabilité du distributeur est trop forte sur les produits agricoles et pas assez forte sur les produits les plus connus, ceux des grandes marques », dénonce-t-il.

Un prix en phase avec le coût de revient

Ces états généraux sont donc l'occasion de « revisiter la contractualisation ». Serge Papin précise qu'il s'agit d'inverser la construction du prix « en partant de la production ». L'objectif est d'être mieux en phase avec le prix de revient du producteur. Mais ce dernier est catégorique : cela ne se traduira pas par une forte augmentation des prix au consommateur.

Faut-il aller encore plus loin en encadrant les promotions ? « Nous pensons qu'il faut absolument réduire les promotions en volume et en valeur », rappelle Christine Valentin, la présidente de la chambre d'agriculture de Lozère. Celle-ci insiste aussi sur la nécessité « d'intégrer les coûts de distribution dans le calcul du seuil de revente à perte ». Cette question n'est pas encore tranchée au sein des états généraux.

Pour les chambres d'agriculture, ces promotions se « répercutent inévitablement sur les prix d'achat au producteur qui tombent en dessous des coûts de production ». Serge Papin est du même avis. « J'ai en tête du poulet vendu à 1,45 euro le kilo. C'est moins cher que la nourriture animale, souligne-t-il. Oui aux promotions mais dans le cadre d'un juste prix payé aux producteurs ». Guillaume Garot, lui aussi, n'est pas contre cette idée. Mais il émet un bémol : « C'est courageux mais c'est exigeant pour les années qui viennent. Il faudra être cohérent ». Ce dernier rappelle que les promotions sont aussi mises à profit, en cas de crise de surproduction, pour dégager des volumes.

Le député de la Mayenne a présenté d'autres propositions émanant des états généraux. Il propose ainsi « d'élever les standards de qualité alimentaire », évoquant le sujet des perturbateurs endocriniens ou des pesticides. Il émet aussi l'idée d'une recherche publique en alimentation