L’agriculture (enfin) au cœur du débat des européennes

Estimant que les candidats aux européennes s’exprimaient trop peu sur les enjeux agricoles, la FNSEA et les JA ont organisé le 14 mai un « grand oral agricole » avec les représentants des six principaux partis. Les syndicats ont salué la volonté de sanctuariser les budgets de la PAC mais ont regretté le manque de propositions sur l’installation et le renouvellement des générations.

Une agriculture rémunératrice, un budget de la PAC maintenu, la lutte contre les distorsions de concurrence ou encore l'installation des jeunes : en matière d'agriculture, les principaux partis candidats aux élections européennes s'accordent sur bien des points. Mardi 14 mai, six candidats représentants les listes créditées de plus de 5% d'intention de vote dans les sondages étaient entendus lors d'une conférence organisée par les syndicats FNSEA et JA. Chaque candidat a eu 30 minutes pour exposer les grandes lignes de son programme agricole et débattre avec des élus des deux syndicats. 

Aucun n'a manqué de mettre en avant son lien avec le monde agricole. Première à s'exprimer, la candidate Les Républicains Angélique Delahaye a ainsi fait savoir qu'elle venait de « terminer de remplir [sa] déclaration PAC ». « J'ai mis deux jours à le faire, alors que mon voisin Allemand, lui, met deux heures ! » a-t-elle rapporté afin d'illustrer le problème de surtransposition du droit européen en France. 

Ingénieur agronome de formation, Romain Dureau, candidat sur la liste de La France Insoumise, a déclaré quant à lui ne pas cacher son envie de « s'installer un jour ». Il défend l'idée d'une agriculture « paysanne et écologique », créatrice d'emplois et dont les productions seraient relocalisées au plus près des aires de consommation. 

Attentes sociétales

Candidate pour la liste Ps-Place publique, Aziliz Gouez a plusieurs fois rappelé ses origines : bretonne, fille d'éleveurs allaitants, elle dénonce l'agriculture intensive « peu demandeuse d'emplois », « sur des surfaces énormes » et « gourmande en intrants » chimiques ». « On ne peut plus continuer sur ce système-là », a-t-elle déclaré. 

Agriculteur bio en Charente-Maritime et candidat sur la liste Europe Ecologie - Les Verts, Benoit Biteau plaide de son côté pour un « changement d'attribution des aides PAC, non pas en fonction de la surface mais en fonction de la main d'œuvre ». Il défend une transition de l'agriculture vers le bio, « qui correspond à des attentes sociétales », et vers une économie circulaire. 

Hervé Juvin, candidat sur la liste du Rassemblement National, qui s'est targué de bien connaître les systèmes coopératifs ainsi que les « banques coopératives agricoles », entend favoriser les circuits courts et protéger les appellations d'origine. Il a également dénoncé « l'impunité » des grands groupes agro-chimiques et « l'ultra-concentration des chimistes et des semenciers »

Dernière candidate à s'exprimer, Nathalie Loiseau, tête de liste de La république en marche, était accompagnée de son colistier et ex-président des JA Jérémy Decerle. Elle prône la protection des agriculteurs face aux aléas via une « politique assurantielle » et reste dans le cap de la politique gouvernementale avec la volonté de sortir du glyphosate et la division par deux des pesticides d'ici 2025, « en concertation avec les agriculteurs ». « Pour cela, nous avons besoin d'une recherche européenne. La France ne peut pas être seule », a-t-elle souhaité. 

Des paroles aux actes

« Il nous ont tous caressé dans le sens du poil, il n'y a pas eu d'agribashing », a ironisé la présidente de la FNSEA Christiane Lambert, en ajoutant que cela ne faisait « pas de mal ». « Nos messages passent sur certains sujets comme les budgets ou les importations, reste à voir leur application », a-t-elle poursuivi.

Le président des JA Samuel Vandaele a déploré le manque de « véritables propositions » des candidats sur le renouvellement des générations, même si tous ont mentionné ce sujet. Enfin, concernant les traités de libre-échange, que tous les candidats ont assuré vouloir réviser, la présidente de la FNSEA était sceptique quant à la transformation des paroles en actes, « quand on sait que des accords sont en train d'être signés ». 

Souhaitant défendre une « Europe forte », de taille à « se confronter aux grands pays-continents que sont la Chine, la Russie et les Etats-Unis », elle appelle les agriculteurs à aller voter le 26 mai.