Pac : la réforme à mi-parcours, c’est fait !

Le Parlement européen a entériné plusieurs assouplissements des règles de conditionnalité portées par les BCAE, avec en prime une dose de flexibilité liée aux conditions climatiques. La France va activer ces nouveaux règlements, moyennant une modification du Plan stratégique national. La FNSEA applaudit, la Confédération paysanne enrage.

La programmation 2023-2027 de la Pac n’aura pas attendu l’échéance de mi-parcours pour amorcer et entériner son processus de révision. Le 24 avril, le Parlement européen a approuvé les révisions du règlement relatif aux Plans stratégiques nationaux, s’alignant ainsi sur les modifications proposées par la Commission européenne, auxquelles a également souscrit le Conseil de l’Europe.

Alors que l’écriture de la Pac 2023-2027 s’était étirée durant plusieurs années (2018 à 2021), il n’aura fallu que quelques mois, et une poussée de fièvre agricole européenne – comme quoi l’Europe se construit – pour modifier substantiellement les règlements, et plus précisément les conditionnalités entourant l’octroi des aides européennes. Le Conseil de l'Europe doit encore approuver le texte avant que la loi ne soit publiée au Journal officiel de l’UE.

BCAE 1, 7, 8 et 9

Concernant la BCAE 1 (maintien d’un ratio régional de prairies et des pâturages permanents), le futur règlement prendra en compte la déprise de l’élevage pour le calcul des ratios de référence. Les obligations de replantation seront par ailleurs assouplies lorsque le ratio annuel de prairies permanentes sera dégradé de plus de 5%, notamment en cas d’artificialisation des terres.

Concernant la BCAE 7 (rotation des cultures), les Etats membres pourront offrir aux agriculteurs la possibilité de de respecter les obligations alternativement par des obligations de rotation ou par des obligations de diversification des cultures.

Concernant la BCAE 8 (jachère et éléments non productifs), l’obligation du respect d’un taux minimal d’éléments favorables à la biodiversité est totalement supprimée. Il ne sera pas nécessaire de mettre en place des jachères ou des cultures fixant l’azote ou dérobées pour respecter la BCAE 8. En contrepartie, les Etats membres sont tenus de proposer des options d’écorégime permettant de rémunérer des pratiques qui contribuent aux objectifs de maintien et de création d’éléments non productifs sur les terres arables, ce dont la France sera dispensée car l’intégrant déjà dans son PSN.

Concernant la BCAE 9 (non labour des prairies sensibles en zone Natura 2000), le futur règlement intègre des exemptions en cas d’endommagements (sécheresses, prédateurs, espèces envahissantes...)

Dérogations pour conditions extrêmes, exemptions pour petites exploitations

Dans les cas extrêmes de conditions météorologiques défavorables empêchant de travailler correctement et de se conformer aux exigences des différentes BCAE, les exploitants concernés bénéficieront de dérogations temporaires. Enfin, les petites exploitations de moins de 10 hectares seront exemptées de contrôles et de sanctions liés au respect des exigences en matière de conditionnalité.

La FNSEA applaudit, la Conf’ enrage

Dans un communiqué, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a déclaré que « les mesures simplifiées de la Pac seront mises en œuvre sans attendre », se disant « réjoui » de « l’adoption large et claire » du règlement de simplification. « En redonnant de la cohérence à la Pac tout en maintenant son ambition environnementale, elles sécurisent l’activité des agriculteurs et soutiennent les capacités de simplification ». Le ministère indique poursuivre le travail sur une révision des modalités de la BCAE 2 (protection des zones humides et tourbières).

Sur le réseau X, le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a jugé que « le Parlement européen a fait preuve ce jour de lucidité face à la crise agricole : les mesures votées de simplification de la Pac sont un début de réponse aux attentes des agriculteurs français comme européens ».

Du côté de la Confédération paysanne, on dénonce une « révision dans la précipitation qui ne règle rien » et qui « instrumentalise la colère exprimée dans le monde agricole au profit des intérêts d’une minorité de bénéficiaires des aides de la Pac. Face à nos demandes d’une Pac plus redistributive et orientée vers la transition, on nous disait qu’une révision était impossible. C’est devenu possible mais uniquement pour détricoter la conditionnalité environnementale », conclut la Conf’, qui regrette que « la révision ne réglera pas le problème de fond qui est celui du revenu agricole ».