La biodiversité au menu du Grand débat national

Dans une lettre aux Français, le président de la République a défini quatre thèmes de débat et suggéré pour chacun une série de questions inspirées par l’irruption et l’éruption des « gilets jaunes ». La transition écologique est un des quatre thèmes et la préservation de la biodiversité l’unique aspect en lien direct avec l’agriculture.

La colère qui anime depuis une 17 novembre une partie de la population française, identifiable à ses « gilets jaunes » et à ses éruptions hebdomadaires, n'a pas de ferment agricole stricto sensu. Acteurs par essence et par nature des territoires ruraux, les agriculteurs peuvent certes se reconnaitre dans la fracture territoriale et sociale qui alimente en partie la colère des Français. Et les problématiques de revenu, de reconnaissance (pour ne pas dire de dénigrement), et d'interrogation sur l'avenir qui minent et laminent les agriculteurs, les « salopettes vertes », comme les désignent aimablement le politologue Eddy Fougier, résonnent avec celles des « gilets jaunes ». Mais l'agriculture n'est pas le sujet (il y avait les EGA pour cela). Et c'est donc logiquement que les mots « agriculture » et « agriculteur » ne figurent pas dans la lettre qu'Emmanuel Macron a adressée aux Français dimanche soir.

Deux questions sur la biodiversité

Il y est néanmoins question des « producteurs ». Dans un chapitre consacré au thème de la transition écologique, les trois autres thèmes étant la fiscalité et les dépenses publiques, l'organisation de l'État et des services publics et enfin la démocratie et la citoyenneté, le président de la République convoque la biodiversité. « Je me suis engagé sur des objectifs de préservation de la biodiversité et de lutte contre le réchauffement climatique et la pollution de l'air », écrit-il. « Aujourd'hui personne ne conteste l'impérieuse nécessité d'agir vite. Plus nous tardons à nous remettre en cause, plus ces transformations seront douloureuses. La question de la biodiversité se pose aussi à nous tous. Comment devons-nous garantir scientifiquement les choix que nous devons faire à cet égard ? Comment faire partager ces choix à l'échelon européen et international pour que nos producteurs ne soient pas pénalisés par rapport à leurs concurrents étrangers ? ». Pas totalement « hors-sol » notre président, même si la question des normes sociales et environnementales vis à vis de nos compétiteurs mériterait assurément d'être élargie à d'autres problématiques que la prise en compte de la biodiversité dans nos modes de production.

Grand débat, mode d'emploi

Mais rien n'empêchera les agriculteurs d'élargir le débat. « Je souhaite aussi que vous puissiez, au-delà̀ de ces sujets que je vous propose, évoquer n'importe quel sujet concret dont vous auriez l'impression qu'il pourrait améliorer votre existence au quotidien », écrit le président, qui entend « transformer les colères en solutions » (...). Ce débat est une initiative inédite dont j'ai la ferme volonté de tirer toutes les conclusions ». Le Grand débat national est organisé sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP), une autorité indépendante. A partir du 15 janvier, citoyens, associations, collectifs, élus, entreprises, syndicats, etc. souhaitant organiser des réunions locales pourront demander à la CNDP l'enregistrement et le kit d'accompagnement des réunions, la mise à disposition de stands mobiles pour informer et recueillir les avis des citoyens, ainsi qu'un accompagnement pour l'organisation d'un atelier. Chacun peut organiser un débat que ce soit à l'échelle du quartier, du village ou de la région. En parallèle, d'autres manifestations seront également organisées au niveau régional ou national pour permettre au plus grand nombre de participer. Des débats se tiendront également en ligne, sur une plateforme numérique dédiée qui permettra de déposer des contributions. Enfin, des conférences de citoyens tirés au sort seront mises en place dans chaque région pour échanger sur les analyses et proposition issues des différents débats. La Grand débat est programmé du 15 janvier au 15 mars. Sur la base de l'ensemble des remontées territoriales et de leur synthèse, des mesures concrètes seront annoncées en avril.