La Filière Viande défend son bifteck

L’Assemblée Nationale vient d’adopter un amendement visant à « interdire certaines pratiques commerciales trompeuses pour le consommateur ». Il vise notamment les produits qui associent des termes comme « steak », « filet », « bacon », « saucisse », à des produits qui ne sont pas uniquement, ou pas du tout, composés de viande. Quelles sont les réelles motivations de la filière ? Peut-on aller plus loin ?

Les temps ne sont pas simples pour la filière carnée française. Déjà en souffrance sur des sujets structurants (valorisation des carcasses, accords de libre-échange à hauts risques), les consommateurs se sentent de plus en plus concernés par les sujets d'éthique, de bien-être animal, de santé mais aussi de pouvoir d'achat, et sont nombreux à faire le choix d'une consommation moins fréquente de produits carnés.

La tendance est aussi de les remplacer par des produits de substitution à base végétale (blé, soja, quinoa, légumineuses ou autre). Les industriels l'ont bien compris, et les professionnels des produits carnés sont aujourd'hui nombreux à avoir franchi le pas de la production de « steaks » végétaux ou de « saucisses » véganes. Or, ces dénominations ont fait l'objet d'un amendement adopté à l'Assemblée Nationale le 19 avril dernier visant à interdire, pour ces types de produits, l'utilisation de termes faisant référence à la viande. Sous prétexte qu'ils seraient trompeurs pour le consommateur... qui sait pourtant, a priori, qu'il ne mange pas vraiment du chien lorsqu'il dévore un hot dog...

Il est, de fait, peu probable qu'un consommateur puisse penser acheter de la viande lorsqu'il choisit un produit de ce type dans les rayons de son supermarché, qu'il s'appelle « haché végétal », « saucisse végétarienne » ou « steak de lentilles ». Et cette opération peut paraître surprenante.

Finalement, cette démarche trouve peut-être davantage son origine dans une stratégie offensive de l'ensemble de la filière viande pour exister et être entendue au sein du débat public. L'adoption récente de l'amendement peut donc être considérée comme un signe positif en provenance des autorités.

Maintenant, après cette « victoire », l'ensemble de la filière doit surtout absolument s'entendre et s'organiser pour défendre d'une seule voix les vrais sujets de fond, comme l'exemplarité de l'agriculture française à tous les niveaux, l'importance de l'apprentissage du goût et des saveurs dès la petite enfance ou le potentiel de la marque France à l'international. On mangera moins de viande à l'avenir ; la filière française devra donc sa survie à sa capacité à mieux la vendre.

Cet article est extrait de la revue PRISME, l'analyse de la conjoncture et de l'actualité agricole et agroalimentaire

Lire tout le dossier : PRISME n° 21 – JUIN 2018 -  L'analyse de la conjoncture et de l'actualité agricole et agroalimentaire