"Non à la concurrence déloyale !"

David Chauve, président de la FNSEA 63 et Baptiste Arnaud, président de JA 63 reviennent sur les conditions et les enjeux de la mobilisation.

Le blocage du site de Cournon a commencé dès le dimanche 10 juin au soir. Comment s'est passée la mobilisation ?

BA : La FNSEA 63 et JA 63 ont mobilisé leurs réseaux en synergie dans le cadre de l'appel à mobilisation national. Nous avons ainsi assuré la mise en place du site et la gestion de la logistique sur la durée du blocage. La participation a été importante dès le dimanche soir (150 personnes, 10 tracteurs). Cela illustre bien le ras le bol général des agriculteurs face aux incohérences et au double discours du gouvernement. Il faut dire que les orientations du gouvernement ne font pas de jaloux, tout le monde trinque quelle que soit sa production : colza, betterave, viande bovine, porcine, volaille...

DC : Depuis les grandes mobilisations de l'été 2015, FNSEA et JA maintiennent la pression sur le sujet des prix agricoles. Les débats sur la construction du prix pendant les Etats Généraux de l'Alimentation, et les avancées obtenues dans le projet de loi alimentation sont les premiers résultats de ce travail de fond. Mais il est navrant de voir que les améliorations se font contre l'avis du gouvernement. Cette posture doit interpeller et mobiliser les agriculteurs.

La problématique de l'huile de palme est largement reprise dans les médias nationaux. Quel en est l'impact sur le département ?

DC : Bien qu'elle ne soit pas prépondérante dans le département, la culture de colza est bien présente. Une importation massive d'huile de palme déséquilibrerait la filière du colza utilisé dans la production de bioéthanol et par conséquent ferait chuter les prix du colza de façon généralisée. Le gouvernement dit promouvoir la filière colza française mais il l'a remet en question en acceptant d'importer de l'huile de palme. L'impact, sur notre département, des orientations gouvernementales est encore plus marqué dans d'autres filières notamment bovine ou sucrière.

Quels sont les enjeux déterminants de cette action ?

BA : L'enjeu agricole qui se joue aujourd'hui c'est ce que seront nos fermes demain.

Confrontées à la concurrence de produits d'importation, deux catégories de fermes pourront résister : celles qui occuperont des niches « haut de gamme » pour répondre à la demande et celles capables d'être compétitives face aux productions du marché mondial (OGM, phyto interdits en France...). Nos fermes aujourd'hui n'entrent pas dans la 2nde catégorie du fait des charges et des contraintes qui leur sont imposées en France. Par conséquent, le nombre de place pour les fermes de la 1ère catégorie seront limitées...

Qu'attendez-vous comme résultat ?

DC : Nous voulons faire inscrire dans la loi alimentation, l'interdiction d'importer des produits non conformes aux normes françaises. Notre action s'inscrit donc dans le temps parlementaire et la loi ne sera définitivement validée qu'à l'automne. Nous savons donc que nous n'obtiendrons pas de réponse satisfaisante à la suite de cette action ponctuelle. Néanmoins il est essentiel que la société et le consommateur prennent conscience des enjeux des importations. Ce pourquoi nous nous battons, c'est aussi l'alimentation de demain.

Dernière minute : Suite de l'action syndicale

À l'heure du bouclage de ce numéro de l'Auvergne Agricole (mercredi 13 juin à 12h), la FNSEA et JA ont appelé à « suspendre le blocage des raffineries pour ne pas bloquer des consommateurs qui ont rejoint notre combat ». Cet appel a été lancé suite au rendez-vous dans la nuit du 12 au 13 juin, avec le ministre de l'Agriculture, ses conseillers, ainsi que les responsables de la FNSEA et de Jeunes Agriculteurs. « Les réseaux JA et FNSEA se sont fortement mobilisés depuis dimanche soir, nous pouvons être fiers de notre capacité à défendre la profession. Notre coup de semonce sur les importations distorsives a réussi. Nous avons sensibilisé les consommateurs sur les incohérences du gouvernement » ont déclaré les représentants des deux syndicats.

Le ministre de l'Agriculture a fait des propositions détaillées qui seront présentées prochainement. « Nous veillerons de très près à la bonne application de ces mesures. Nous ne lâcherons pas le gouvernement sur le caractère vital des enjeux que nous portons et nous envisagerons de nouvelles actions si nécessaire » ont-ils conclu.