Pau: manifestation d'agriculteurs contre la réforme des "zones défavorisées"

Des agriculteurs à bord d'une centaine de tracteurs manifestaient jeudi à Pau pour dénoncer le projet européen de réforme des "zones défavorisées simples" (ZDS), un dispositif donnant droit à des aides spécifiques aux éleveurs dont ils refusent d'être privés.

De son côté, le président socialiste de la région Nouvelle-Aquitaine, Alain Rousset, a annoncé avoir écrit au Premier ministre, Edouard Philippe, pour lui faire part de son inquiétude sur ces modifications de la carte des ZDS. "Elles auraient pour conséquence, si rien n'était fait, d'entraîner une régression notable de l'élevage dans des zones intermédiaires" et "des pertes significatives d'emplois en milieu rural", écrit M. Rousset. Le vice-président de la région chargé de l'Agriculture, Jean-Pierre Raynaud, doit rencontrer vendredi matin à Paris le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, pour discuter de cette "colère agricole".

Jeudi à Pau, les agriculteurs ont déversé du lisier sur la façade de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), puis pique-niqué devant la Chambre d'agriculture, avant de défiler dans le centre-ville, selon la police et le syndicat agricole FDSEA, à l'origine de la mobilisation avec les Jeunes agriculteurs. Leurs collègues de la région Occitanie et du Lot-et-Garonne ont manifesté à plusieurs reprises ces derniers jours mais ont levé les blocages routiers mercredi soir, après des nouvelles "positives" obtenues, selon eux, lors d'une réunion au ministère de l'Agriculture. Celui-ci doit notamment revoir le redécoupage des zones défavorisées avant de soumettre sa copie à Bruxelles afin de réintégrer certaines communes.  

"Compenser un handicap naturel"

"Sur le projet de réforme présenté initialement, nous avions zéro communes classées contre 121 actuellement. Et dans le futur projet nous sommes déjà à 154 (...) Nous avons obtenu des avancées de la part du ministère mais nous voulons aller beaucoup plus loin aujourd'hui pour qu'il y ait vraiment cette reconnaissance d'équité entre les territoires", a expliqué Bernard Layre, président de la FDSEA des Pyrénées-Atlantiques.   Les aides accompagnant le classement en zones défavorisées existent depuis 1976 "pour compenser un handicap naturel. Elles représentent pour une exploitation moyenne 4 à 5.000 euros par an et c'est indispensable au complément de revenu d'un agriculteur", a plaidé M. Layre, interrogé par l'AFP.

"Bruxelles édicte qu'on ne doit pas dépasser 1,4 bovin à l'hectare et 1.858 euros de revenus à l'hectare.Or nous avons de très petites exploitations et nous sommes au-dessus, avec plus de 2.000 euros à l'hectare", décrypte le syndicaliste. Pour M. Layre, "la réforme va favoriser des exploitations qui font en moyenne 300 à 400 ha dans l'Indre ou le Cher au détriment des petites exploitations dans des côteaux". Plus largement, la Nouvelle-Aquitaine serait la région "la plus impactée avec 2.000 éleveurs qui ne bénéficieraient plus de l'Indemnité compensatrice de handicaps naturels (ICHN) dès 2020, ce qui représenterait pour ces exploitations une perte nette de 15 millions d'euros par an", selon l'exécutif régional. Seraient en particulier concernées des zones d'élevage de Dordogne, du Lot-et-Garonne et des Pyrénées-Atlantiques, et l'ensemble du département des Deux-Sèvres serait "déclassé", souligne la région.