Protéines : les recettes du think tank AgriDées

Des aides couplées pour les surfaces en herbe, un effort génétique en colza et légumineuses, un recours encadré aux coproduits animaux et insectes : telles sont les pistes avancées par le laboratoire d’idées pour réduire les carences de l’Union européenne en protéines végétales.

37 % : c'est le déficit de la France en protéines végétales, selon le ministère de l'Agriculture. La France a donc largement recours à l'importation pour satisfaire les besoins de l'alimentation animale en protéines végétales. Le salut ne vient pas de l'Union européenne où le déficit atteint 65 %. Dans le cadre du projet de réforme de la Pac 2021-2027, le laboratoire d'idées AgriDées, indépendant et apolitique, et dont les origines remontent à 1867 (ex-Société des agriculteurs de France), soumet ses pistes de réflexion.

Etat des lieux en France

« Doit-on rappeler que pour l'élevage, notamment bovin, l'herbe est la première source de protéines », rappelle AgriDées. En France, l'élevage consomme annuellement 110 millions de tonnes de matières sèches pour son alimentation, dont 71% de fourrages, 13% de matières premières en l'état (y compris autoconsommation) et 16% d'aliments composés industriels. En 2017, la production d'aliments composés en France a été de 20,6 M t, dont 8,5 pour les volailles, 5 pour les porcs, 5 pour les bovins et 2 pour les autres espèces. Les fabricants d'aliments français couvrent les besoins en protéines des rations qu'ils fabriquent à 24% par les céréales, 12% par les coproduits céréaliers et 57% par les tourteaux (dont 54% de soja, 26% de colza, et 20% de tournesol). La France importe 3,5 M t de soja par an.

Etat des lieux en Europe

Au sein de l'UE, la consommation de matières premières destinées à l'alimentation animale s'établit à 264 M t/an, dont 45 M t de protéines. Celles-ci sont apportées pour 38% par les céréales et pour 45 % par les tourteaux (dont 2/3 de soja). L'UE produit 3 M t de graines de soja et en importe 30 à 35 M t (graines et tourteaux). Il n'existe pas d'estimation de la contribution des fourrages à ce bilan. AgrIdées demande à ce que les bilans statistiques protéiques annuels publiés dans l'observatoire des marchés de la Commission européenne soient complétés par la contribution des prairies et détaillés par espèces, en équivalent protéines.

Soutenir l'herbe et la génétique en légumineuses et colza

Pour inciter à développer plus encore la production d'herbe, le think tank suggère d'instaurer des aides couplées au bénéfice des surfaces en herbe, tout particulièrement en zones de plaine et défavorisées simples. S'agissant des légumineuses, la recherche de nouvelles variétés est prônée, ainsi qu'un effort de sélection variétale, moyennant la mobilisation de fonds issus du second pilier de la Pac (développement rural). Le même effort génétique est requis concernant le colza, avec une réorientation des critères de sélection sur la protéine, au détriment de l'huile, les biocarburants de 1ère génération étant de moins en moins d'actualité.

AgriDées plaide aussi pour une campagne de communication européenne sur les protéines et leurs utilisations. Le think tank réclame des efforts de transparence aux acteurs du marché et davantage de réactivité de la part du législateur.

Protéines d'insectes et soja importé

Il remet aussi sur la table (ou à l'auge) la question des coproduits animaux, contingentés au petfood (alimentation es animaux de compagnie) depuis la crise sanitaire de la vache folle. « Utiliser davantage de farines de viandes dans l'alimentation des animaux d'élevage, dans une démarche de bioéconomie, et dans le strict respect de la réglementation sanitaire en place, permettrait de diversifier les sources de protéines en réduisant la pression sur les productions végétales », est-il suggéré, au même titre que l'intégration de farines d'insectes. En dépit de ces orientations, AgriDées estime que l'autonomie en protéines reste hypothétique. La faute au soja. Le tourteau est paré de la plus haute teneur protéique (48%) et, qui plus est, d'une qualité inégalée, due à sa richesse en lysine (acide aminé indispensable). Et en prime, il est crédité d'une très bonne digestibilité.