Après le gel, l’État débloque un milliard d’euros

Le fonds comprend des mesures d’urgence en soutien à la trésorerie des exploitations impactées, en attendant la réforme du système assurantiel, qui pourrait davantage faire appel à la « solidarité nationale ». La FNSEA estime à 4 milliards d’euros l’impact du gel des 7-10 avril.

« Je rappelle aux Françaises et aux Français que l’agriculture a été présente depuis le début de la crise sanitaire, nous n’avons manqué de rien grâce à nos agriculteurs, il était donc indispensable, au moment où cette profession est très durement impactée par des circonstances exceptionnelles que la Nation soit à son tour présente à ses côtés, elle l’est et elle ne cessera pas de l’être ». A l’occasion d’un déplacement dans l’Hérault, dans l’Aude et dans les Pyrénées-Orientales le samedi 17 avril, le Premier ministre Jean Castex a annoncé le déblocage d’un fonds de solidarité exceptionnel d’un milliard d’euros.

"C’est une question de survie pour bon nombre d’exploitants mais aussi de territoires"

« A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles, a appuyé Jean Castex. C’est une question de survie pour bon nombre d’exploitants mais aussi de territoires ».

Les mesures d’urgence

Année blanche de cotisations, dégrèvements de taxes foncières sur le non bâti (TFNB), mobilisation des dispositifs existants en matière d’activité partielle et de Prêt garanti par l’Etat (PGE) : telles sont quelques-unes des mesures d’urgence annoncées par le Premier ministre, précisant qu’elles seraient « rapidement déployées ».  Une enveloppe d’urgence sera par ailleurs allouée aux Préfets pour apporter un soutien immédiat aux exploitations les plus en difficulté.

Ces mesures d’urgence seront suivies de mesures « exceptionnelles ». L’indemnisation des arboriculteurs au titre du dispositif des calamités agricoles sera portée jusqu’à 40% pour les pertes les plus importantes. Pour les autres filières qui ont été très touchées et qui ne sont pas aujourd’hui couvertes par ce régime de calamités agricoles, notamment les viticulteurs, « un soutien exceptionnel similaire sera mis en place, précise le communiqué de Matignon. Les agriculteurs assurés bénéficieront aussi du soutien de l’Etat et seront ainsi mieux indemnisés ».

Des abricots gelés à Saint-Génis-des-Fontaines dans les Pyrénées-Orientales
Des abricots gelés à Saint-Génis-des-Fontaines dans les Pyrénées-Orientales

Dans l’attente de ces aides qui nécessitent de connaitre l’ampleur des pertes agricoles, une avance forfaitaire basée sur la perte de chiffre d’affaires mensuel sera accordée. Ce fonds exceptionnel sera aussi ouvert aux entreprises aval de ces filières, qui seront impactées par l’absence de récolte à conditionner ou à transformer.

Un impact d’au moins 3,5 milliards d’euros

Le ministre de l’Agriculture précisera « dans les tous prochains jours » les modalités de certaines de ces aides d’urgence à l’occasion d’une nouvelle réunion de la cellule de crise.

Le 18 avril sur l’antenne d’Europe 1, la présidente de la FNSEA a salué les annonces du gouvernement tout en mettant en parallèle l’ampleur de la catastrophe. « Pour le vin et pour la viticulture, l’estimation est à deux milliards de pertes, a déclaré Christiane Lambert. Pour les fruits, l’estimation est à 1,5 milliards d’euros et je ne parle pas des betteraves et des autres cultures. Un milliard, c’est un quart de la perte, c’est un premier ballon d’oxygène indispensable pour donner de la trésorerie à des agriculteurs qui se trouvent avec zéro recette du jour au lendemain ».

La FNSEA évoque une « perte historique  » et une « catastrophe économique », préjudiciables aux filières et à l’emploi.

« Davantage appel à la solidarité nationale »

Aux côtés des mesures d’urgence, le Premier ministre a annoncé le doublement de l’enveloppe allouée par le Plan de relance à l’adaptation de l’agriculture au changement climatique, qui passera ainsi à 140 millions d’euros.

Il s’est enfin engagé à revoir le régime assurantiel, attendant de ses ministres de l’Agriculture et de l’Économie qu’ils lui fassent des propositions « dans les prochains jours ». « Le régime assurantiel tel qu’il existe pour ce secteur professionnel n’est plus adapté à la situation (...) cela fait vingt ans que l’on en parle, a dit Jean Castex. Il est indispensable que nous le réformions en faisant davantage appel à la solidarité nationale ».

Le rapport du député Frédéric Descrozaille, commandité par Julien Denormandie en début d’année et dont les conclusions sont imminentes, devrait arriver à point nommé

"Nous avons proposé à la FNSEA depuis 2014 un dispositif d’assurance, on n’a jamais eu de ministre assez courageux pour le mettre en place"

S’agissant du régime des assurances, Christiane Lambert estime que « trop peu d’agriculteurs s‘assurent parce que le dispositif est coûteux et difficilement accessible (...). Nous avons proposé à la FNSEA depuis 2014 un dispositif d’assurance, on n’a jamais eu de ministre assez courageux pour le mettre en place, j’espère que cette fois-ci l’alerte est assez rude pour que les politiques mesurent que les agriculteurs ne peuvent pas seuls faire face à des aléas aussi importants. Les petits aléas, nous savons faire mais quand ça atteint des degrés comme celui-ci, -8°C en deux heures, -10°C au bord de le Méditerranée, personne ne peut résister ».