Bruxelles lie les Plans stratégiques nationaux au Green Deal

La Commission européenne a adressé à chaque Etat membre ses recommandations afin que la prochaine Pac soit conforme aux objectifs du Green Deal. Outre le respect des six indicateurs environnementaux, la France est notamment invitée à cesser de retourner les prairies permanentes, à planter des haies, à améliorer le bien-être animal, à promouvoir l’agroforesterie ou encore à rémunérer la séquestration de carbone.

C’est désormais acté : le Plan stratégique national que chaque Etat membre va devoir remettre à la Commission européenne courant 2021 devra prendre à son compte les objectifs que s’est assignée l’Union européenne à travers le Grean Deal et ses déclinaisons agricoles que sont la stratégie Biodiversité et la stratégie Farm to fork (de la ferme à la fourchette). En date du 18 décembre dernier, la Commission l’a signifié au 27 Etats membres. Chaque Etat s’est vu spécifié une liste de recommandations fondées sur un diagnostic initial propre à chaque pays et sur des objectifs finaux communs à tous les pays. Certains objectifs, notamment environnementaux, sont explicitement chiffrés et confèrent à la Pac une ambition inédite, ne se contentant plus d’objectifs de moyens mais d’obligations de résultats. Une petite révolution qui place certains Etats membres sur le qui-vive car le non-respect des indicateurs de performance pourrait faire le lit à des mesures de rétorsion.

De leur côté, les organisations professionnelles agricoles aimeraient bien disposer des études d'impact de cette future Pac, aux plans des revenus, de la sécurité et de la souveraineté alimentaires.

Les indicateurs environnementaux

Les Plans stratégiques nationaux (PSN) sont l’incarnation de cette nouvelle approche. Chaque Etat est sommé d’y consigner ses orientations. Sous l’apparence d’une réappropriation de la Pac par les Etats, si prompts à décrier les injonctions européennes parfois déconnectées des particularismes cantonaux, la Commission met en demeure chaque Etat membre d’inscrire dans son PSN les tenants et les aboutissants de sa politique agricole. Et pour ceux qui seraient peu inspirés, la Commission a dressé une liste de recommandations, où figurent en bonne place les indicateurs environnementaux et climatiques à atteindre d’ici à 2030, conformément au Green Deal.

La Commission vient ainsi de publier les valeurs de référence de chaque Etat membre, ce qui laisse à chacun le moyen d’apprécier le chemin à parcourir pour réduire, comparativement aux moyennes de l’UE à 27,  de 50% l’usage et la nocivité des pesticides, de 50% l’usage des antibiotiques en élevage et en aquaculture, de 20% l’utilisation d’engrais et enfin de 50% les pertes d’éléments minéraux dans l’environnement. Dans ce domaine, trois sous-indicateurs seront jaugés, à savoir les tonnages d’azote et de phosphore et le taux de points de captages d’eau affichant des concentrations en azote supérieures à 50 mg/l. S’agissant des pesticides, la période 2015-2017 servira de référence à la trajectoire des -50% à l’horizon 2030. Concernant le volet nocivité, l’UE n’a pas communiqué les quantités de pesticides dangereux commercialisés dans chaque État membre en raison des règles de confidentialité des données statistiques. Il faudra aussi atteindre 25% de SAU en agriculture biologique (8,5% en France à fin 2019) et 10% de SAU en surfaces à haute diversité biologique (mares, bandes tampon, haies...). Ces surfaces sont estimées par la Commission à 2% en France.

La Commission exige par ailleurs le déploiement du haut débit sur 100% du territoire d’ici à 2025.

Recommandations climatiques et autres

Au-delà de ces objectifs chiffrés, la Commission européenne énonce des recommandations qualitatives dont beaucoup sont en lien avec les objectifs environnementaux évoqués précédemment. Il en va de même pour les objectifs climatiques, l’UE s’étant fixé une réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 (par rapport à 1990) en vue d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Sur la question du carbone, notre pays est notamment invité à mettre fin au déclin des prairies permanentes, à planter des haies, à réaliser des diagnostics carbone, à promouvoir l’agroforesterie ou encore à rémunérer la séquestration de carbone. Elle est aussi invitée à progresser en matière de bien-être animal, notamment au niveau des élevages de poules pondeuses et de porcs, et du transport des animaux. Les outils de gestion des risques sont aussi perfectibles. La Commission encourage la France a poursuivre sa politique de convergence et de redistribution des aides en faveur des jeunes et des exploitations les plus vulnérables et/ou porteuses de durabilité.