De l’Espagne à la Manche, enquête sur un trafic de pesticides interdits

Le parquet de Coutances enquête sur un trafic qui a permis l’importation illégale d’Espagne de 80 tonnes de phytos, interdits en France, et répandus dans le secteur de Créances. Une situation qui Jean-Luc Leblond estime « regrettable », tout en mettant l’impasse dans lesquels les producteurs se trouvent.

Une enquête engagée avant l’été vient d’aboutir à l’audition de plusieurs producteurs de légumes du secteur de Créances pour avoir utilisé des produits phytosanitaires à base de dichloropropène, interdit depuis 2018., année où la dérogation d’utilisation a été refusée.  Près de 80 tonnes de produits auraient été importées d’Espagne. Aux côtés des maraîchers utilisateurs, trois importateurs-revendeurs et trois transporteurs ont été auditionnés en garde à vue ou en auditions libres dans la Manche, le Gard et les Pyrénées-Orientales. Plusieurs saisies ont également été effectuées et notamment 23 tonnes de produits interdits non encore utilisés.  Les différents acteurs présumés de ce trafic font l’objet de poursuites entre autres, pour mise sur le marché, détention, utilisation en bande organisée de produits non autorisés. Les investigations sont toujours en cours.

La justice suit son cours

« Nous ne sommes pas au bout de la procédure », note Jean Luc Leblond, président de la section légumes de la FDSEA de la Manche, qui « regrette que la filière se retrouve dans cette situation », tout en laissant la justice suivre son cours. « Il faut attendre le verdict », confie-t-il.


Les promesses n’en finissent pas d’aboutir

Mais comme responsable syndical, il veut mettre en lumière l’impasse dans laquelle les producteurs se trouvent. « Depuis le refus de la dérogation en 2018 d’utilisation du dichloropropène, un plan d’aide avait été promis par Stéphane Travert. Depuis d’autres ministres de l’Agriculture sont passés. Et l’actuel ministre, Julien Denormandie, a annoncé une enveloppe de 1 million d’euros pour les hectares non emblavés. Or, vu les contraintes, un seul producteur était éligible. Les promesses n’en finissent pas d’aboutir », se désole Jean-Luc Leblond.

Des gens en difficulté

Dans le plan de lutte, une trentaine de producteurs se sont engagés afin d’allonger les rotations, produire des carottes tous les cinq ans, produire pendant deux ans des plantes nématocides tel que le sorgo afin de réduire la présence des nématodes. « Nous l’avons déjà fait pendant un an. Et nous n’avons toujours pas de compensations, ni de chiffrages », dénonce Jean-Luc Leblond. Au-delà des promesses du plan, les producteurs ont toujours demandé l’application de la clause de sauvegarde, celle qui consiste à ne pas importer des carottes produites avec des pesticides interdits en France. « A force, les producteurs sont en difficulté. Il est temps de ramener de la sérénité et de la crédibilité chez les producteurs », conclut Jean-Luc Leblond.