Bovin viande : le maigre plutôt épargné, mais l’incertitude est grande pour les animaux finis

Sur le marché du maigre, la production ne subit pas de régulation pour l’instant. Pour les broutards, nous sommes dans l’habituelle baisse saisonnière de l’offre. En parallèle, il n’y a pas de problème de demande en Italie, ces derniers ont la volonté de remplir les ateliers d’engraissement et par conséquence, faire tourner les abattoirs.

La demande des consommateurs italiens durant cette période de confinement se tourne vers de la viande italienne ou « franco-italienne » issue de nos broutards. Donc pour l'instant, le marché du broutard français se tient. Du côté des pays tiers, des inquiétudes se développent. Bien que les échanges se soient maintenus jusqu'à présent, on peut pressentir une baisse avec la fermeture du marché tunisien pour cause de covid-19 et du marché algérien, suite à la baisse des cours du pétrole.

Pour le Jeune Bovin, la situation est plus compliquée puisque cette viande est habituellement exportée et orientée vers des débouchés de RHD. Il faut s'attendre à une baisse des cours sur ces animaux et une régulation de la production en fonction des capacités de stockage des opérateurs de la filière. À ce jour, le rythme des abattages des vaches de réformes est similaire à celui des années précédentes. Les cotations se sont maintenues dans la tendance des premiers mois de 2020.

Mais avec l'annonce du confinement, les consommateurs ont acheté plus massivement des produits hachés au détriment du piécé.

Aujourd'hui, l'enjeu est de repositionner les « bons » morceaux de la carcasse dans les créneaux de distribution pour maintenir la valorisation des animaux. L'autre point déterminant est la capacité des opérateurs à stocker de la viande dans les frigos pendant la durée du confinement si toutefois il y avait un déséquilibre fort entre l'offre et la demande. À terme, certaines zones d'ombre existent quant à l'activité des opérateurs filière (coop, négociants, abattoirs) et les potentielles décisions de fermeture ou non des unités faute de main-d'œuvre et d'absentéisme du personnel.

Cela concernerait les chaînes de transformation mais aussi le ramassage et l'approvisionnement des sites. L'évolution des cotations sur les produits finis (vaches, JB...) va donc dépendre :

• des stocks de viande encore disponibles à Rungis qui devront être écoulés dans les prochaines semaines ;

• du maintien de la logistique de la filière ;

• de l'afflux des vaches de réformes laitières qui pourraient être plus nombreuses suite à l'appel de l'interprofession à baisser la production pour lisser le « pic » printanier ;

• la capacité de stockage des opérateurs pour équilibrer l'offre et la demande. La filière Bovin viande française est sur ces premières semaines de confinement, moins impactée par le covid-19 que certains voisins européens tels que l'Irlande, l'Allemagne ou encore la Pologne. Effectivement, leur plus forte dépendance aux exportations et à la restauration hors domicile les fragilise. Les questions à venir sont les suivantes : quel sera le positionnement de l'Europe ? Irons-nous vers un repli nationaliste ou une recherche d'une voie d'avenir à l'échelle européenne ?

 

Sabine MICHEL et Nathalie VELAY - cerfrance