Entre vaccination et moindre circulation, la France quasi épargnée par la grippe aviaire

La France a été largement épargnée par la grippe aviaire ces derniers mois grâce à la combinaison d'une moindre circulation du virus en Europe et de la vaccination des canards, qu'elle est le seul pays européen à pratiquer.

Au total, seulement 10 foyers de volailles et 22 cas sauvages ont été recensés en France depuis le début de la saison en août 2023, selon le dernier bulletin hebdomadaire de la plateforme française d'épidémiosurveillance en santé animale (ESA) collectant des données jusqu'au 3 mars. A la même époque l'an dernier (au 5 mars 2023), 307 foyers de volailles, 85 foyers d'oiseaux captifs (zoos, basses cours et oiseaux d'ornement) et 323 cas sauvages avaient été détectés.

La combinaison de « deux conditions favorables » - la vaccination et la moindre circulation du virus dans la faune sauvage – « a un impact sur le nombre de foyers détectés en France », a affirmé Béatrice Grasland, responsable du laboratoire national de référence pour l'influenza aviaire à l'Anses. « D'autres pays produisent aussi du canard, notamment en Hongrie, et ne vaccinent pas, et le nombre d'élevages impactés y a été beaucoup plus important », a-t-elle souligné.

La France, particulièrement touchée par le virus de l’Influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) depuis 2015, a abattu plus de 30 millions de volailles entre l'été 2021 et l'an dernier. Après un changement de la réglementation européenne, qui interdisait la vaccination contre le virus en élevage jusque début 2023, Paris a donc décidé de rendre obligatoire cette vaccination dans les exploitations de plus de 250 canards, hors reproducteurs. La campagne a commencé le 1er octobre dernier. Début mars, 21,6 millions de canards avaient reçu au moins une injection, selon le ministère de l'Agriculture. Après l'apparition des premiers foyers en novembre, Paris a aussi relevé début décembre le niveau de risque à « élevé », obligeant les éleveurs de plein air à confiner leurs volailles.

Expansion de la vaccination ?

Dans le même temps, le virus continue de circuler en Europe, « mais de manière moins importante que l'année dernière sur les mêmes périodes », a indiqué Béatrice Grasland. Selon le bulletin de l'ESA, 288 foyers de volailles, 61 foyers d'oiseaux captifs et 690 cas sauvages ont été recensés en Europe depuis le 1er août, 33 pays ayant détecté la présence du virus sur leur territoire. L'an dernier à la même période, 881 foyers de volailles  (principalement en France, au Royaume-Uni et en Hongrie), 352 foyers d'oiseaux captifs ainsi que 2.206 cas sauvages étaient déjà recensés. « On peut faire l'hypothèse que (depuis l'apparition du virus en Europe, NDLR), les animaux qui ne sont pas morts suite à ces infections ont quand même acquis un certain niveau d'immunité et ont pu transmettre aux juvéniles un certain niveau d'immunité », a avancé Béatrice Grasland. Des épisodes de « diffusions massives dans certaines populations d'oiseaux sauvages comme par exemple les goélands ou les mouettes au moment de la nidification » apparaissent encore régulièrement, a-t-elle toutefois nuancé.

En date du 4 mars 2024, 21.629.715 canards ont fait l'objet d'une vaccination contre l'IAHP (Source : ministère de l’Agriculture)
En date du 4 mars 2024, 21.629.715 canards ont fait l'objet d'une vaccination contre l'IAHP (Source : ministère de l’Agriculture)

Au vu du visible succès de la campagne de vaccination en France, sera-t-elle étendue à d'autres pays? « Cela relève de la décision de chaque Etat », a indiqué Béatrice Grasland. Le ministère français de l'Agriculture quant à lui « évaluera s'il souhaite poursuivre dans cette voie-là », sachant que « les premiers bilans qu'on peut faire sont plutôt positifs », a ajouté la responsable.

L'expansion de la vaccination à d'autres espèces comme les poules ou les dindes dépendra quant à elle « d'une évaluation des coûts », a avancé Béatrice Grasland. La campagne de vaccination des canards était évaluée à son lancement à environ 100 millions d'euros par le ministère. La vaccination, a aussi souligné la responsable, reste un outil parmi d'autres pour arrêter la circulation du virus comme des mesures de biosécurité (bottes désinfectées dans les bâtiments d'élevage par exemple) ou le confinement des volailles.