L’absence de clauses miroir, une situation « ubuesque »

Rien n’empêche l’Europe de fixer des règles pour les produits importés, « si ce n’est un déficit d’ambition européenne partagée », déplorent dans un tribune un collectif d'eurodéputés, de représentants d'ONG environnementales et de représentants du monde agricole dont Interbev.

« Nous partageons un constat : les agriculteurs sont soumis à des distorsions de concurrence vis-à-vis des importations de nos partenaires commerciaux qui limitent la transition de l’agriculture européenne vers plus de durabilité ; les produits agricoles que nous consommons en Europe ne respectent pas toujours les mêmes règles selon qu’ils sont produits au sein du marché européen ou importés », écrivent dans une tribune publiée le 25 octobre sur le site internet du « Monde », un collectif d’eurodéputés, la fondation Nicolas Hulot, l’institut Veblen et Interbev.

Sans la mise en place de mesures miroirs, « du point de vue des agriculteurs, la situation est absurde », déclarent-ils. « Alors même qu’ils peinent trop souvent à dégager un revenu décent, faute de prix suffisamment rémunérateurs, ils ne peuvent se trouver dans le même temps, exposés à une concurrence déloyale avec des produits importés moins-disants sur le plan sanitaire, environnemental et en matière de bien-être animal. Alors même que nous devons privilégier un modèle d’élevage familial et herbager – sans commune mesure avec certaines fermes usines américaines de plusieurs milliers de bovins engraissés de manière industrielle –, l’Europe se doit d’apporter aux paysans cette protection essentielle. Du point de vue du consommateur européen, l’absence de mesures de réciprocité efficaces apparaît ubuesque alimentant des sentiments d’incompréhension ; le risque étant également que son choix se porte vers des produits loin de nos standards ».

"Un déficit d'ambition"

En outre, ce système de « deux poids deux mesures » menace aussi l’atteinte des objectifs environnementaux et climatiques définis dans le Green Deal et la stratégie européenne « De la ferme à la fourchette », poursuivent les auteurs. « Comment convaincre les agriculteurs européens de réduire l’utilisation des pesticides ou des antibiotiques d’ici à 2030, si les interdictions ne s’appliquent pas aussi de manière intégrale aux produits d’origine étrangère importés en Europe ? »

« L’UE constitue pour le reste du monde un marché immense et porteur de 450 millions de consommateurs à pouvoir d’achat élevé. Elle est en capacité de fixer des règles pour les produits importés, équivalentes à celles qui s’appliquent pour les producteurs européens. Et rien ne l’empêche de le faire, si ce n’est un déficit d’ambition européenne partagée », estiment les signataires de la tribune, indiquant que dans les prochains mois, ils s’efforceront de « mettre fin aux divergences réglementaires qui existent à chaque fois que cela sera possible, dès qu’une opportunité se présentera », dans l’ensemble des textes législatifs sur lesquels ils seront amenés à travailler.