L’inflation n’a pas encore rendu les armes

[Edito] L’inflation, qui était perçue comme temporaire pendant la crise du covid, s’est désormais installée en France. Elle plonge l’agriculture et l’agroalimentaire dans l’incertitude pour 2023.

Déjà entamée en 2021, la hausse des prix s’est accentuée en 2022, alors que la guerre en Ukraine s’est désormais installée en Europe. Inférieure à 1% en janvier 2021, la hausse des prix à la consommation s’est emballée pour atteindre 3% en janvier 2022, et culminer à 6,2% en novembre. Des niveaux jamais vu depuis les chocs pétroliers de 1974 et 1979. De leur côté, les prix à la production des produits agricoles sont supérieurs de 30% à la moyenne quinquennale. Les prix des intrants restent très élevés en raison des tensions sur le marché mondial des engrais et des difficultés d’approvisionnement en gaz. Ce contexte a entraîné une forte baisse des livraisons d’engrais pour la campagne 2022-2023, avec une diminution de 30% des engrais azotés et de plus de 50% pour le phosphore et la potasse. Ces baisses d’apports d’engrais, voire ces impasses chez certains agriculteurs, ne sera pas sans conséquences sur les rendements des cultures.

En décembre, la hausse des prix a ralenti à 5,9% sur un an, selon l'Insee. Mais un pic reste anticipé par le gouvernement pour ce début d’année. Comme toutes les petites entreprises, les exploitations agricoles sont fragilisées. Les mesures d’accompagnement mises en place par l’Etat, telles que le report de paiement des impôts et cotisations sociales, ne seront pas suffisantes, estime la FNSEA. Dans un communiqué publié le 5 janvier, le syndicat explique que « le report de paiement des cotisations sociales est déjà en vigueur dans le monde agricole, pour toute entreprise faisant état de difficultés financières. Quant au report du paiement de l’impôt, il n’a d’impact réel qu’en présence de résultats passés importants, ce qui n’est pas le cas pour ces entreprises ».

La baguette et le blé

Quelques semaines après que la baguette de pain française ait été classée au patrimoine mondial immatériel de l’Unesco, le gouvernement s’est particulièrement inquiété du sort des boulangeries, qui craignent pour leur survie. « Comme pour les boulangers, la répercussion de la hausse des coûts de l’énergie sur le prix des produits alimentaires français a ses limites, avec en plus un risque élevé de voir les importations de produits étrangers augmenter afin de servir d’amortisseur », alerte la FNSEA. Pour le syndicat, le salut passera par l’instauration d’un bouclier tarifaire sur l’énergie pour les entreprises agricoles. « Faute de quoi de nombreuses exploitations sortiront très fragilisées de cette crise ou n’en sortiront pas », craint-elle.