« Le consommateur doit payer la valeur du produit qu'il achète »

La crise sanitaire n’a pas épargné la société laitière de Laqueuille dont le chiffre d’affaires a chuté de deux millions d’euros en 2020 mais le rebond est aujourd'hui aux portes de la laiterie, boosté par les Aop et le bio.

 Le 25 juin, la société laitière de Laqueuille tenait son assemblée générale ordinaire à la salle des fêtes de la commune en présence de Damien Lacombe, président de Sodiaal, partenaire de la SICA Laqueuille, et du sénateur agriculteur de la Haute-Loire, Laurent Duplomb, venu rendre hommage au président Denis Aubert en partance.
2020, l’impasse…
Mars 2020, la société laitière de Laqueuille est stoppée net dans son élan de croissance. Tous les signaux étaient pourtant au vert avec une année 2019 à l’équilibre et une croissance dynamique, capable d’absorber les gros investissements engagés sur les cinq dernières années, notamment dans la mise en place d’un système de récupération d’énergie. Mais l’arrivée brutale du covid-19 en a décidé autrement. Confinement, fermeture des restaurants et des rayons découpe, chamboulement dans les habitudes de consommation… la laiterie doit faire face. Pour éviter les pertes de marchandises, elle fait alors un don de 15 tonnes de fromages à la banque alimentaire et vend à moitié prix le reste de ses produits. Parallèlement, elle développe la vente à distance par internet, un challenge réussi mais qui ne comble pas les pertes enregistrées par ailleurs. Le chiffre d’affaires chute alors de 2 millions d’euros en 2020.
Dans ce contexte inédit, la collecte de lait se maintient à plus de 13 M le litres avec une stabilité des niveaux de qualité des laits et " l’objectif de maintenir un prix du lait significatif autour de 326€ /1000 litres en qualité A " explique Philippe Lorrain, directeur de l’entreprise.
… 2021, le rebond ?
Depuis quelques semaines, les vannes des marchés se réouvrent et la laiterie retrouve peu à peu son rythme commercial de croisière, boosté par la croissance régulière des ventes en ligne qui pourraient " atteindre +58% à fin 2021 ", selon le directeur. Une tendance positive qui conforte la laiterie dans son ambition de renforcer sa gamme de fromages Aop à travers le Bleu d’Auvergne et la Fourme d’Ambert mais aussi celle du bio dont la transformation représente 346 tonnes aujourd’hui (sur 3 500 ton-nes de fromages par an), " notre objectif est d’atteindre 500 tonnes " confie Philippe Lorrain.
Des espoirs dans Egalim 2
Si cette ambition globale est partagée par les producteurs-coopérateurs de la laiterie, ces derniers ne cachent pas leur inquiétude face à l’avenir. A l’occasion de cette assemblée générale, certains d’entre eux n’ont pas manqué de rappeler le contexte difficile dans lequel ils étaient avec des charges en hausse de 30% et un prix du lait qui stagne autour de 300€. " A ce rythme, sur les 51 adhérents de la SICA, combien en restera-t-il d’ici 5 ans ?" interroge un jeune producteur ; et " comment attirer et installer des jeunes avec un revenu de 500€/mois ? ", poursuit un autre…  " Notre combat du moment est de retrouver de l’inflation sur les  prix de vente des produits laitiers aux consommateurs " répond Damien Lacombe, président de Sodiaal. Et d’ajouter : " la loi Egalim ne réglera pas tout, il faut aussi changer de paradigme et faire en sorte que le consommateur paie enfin la valeur du produit qu’il achète ". Pour le Sénateur Laurent Duplomb, le retour à un juste prix pour les producteurs passe davantage par l’arrêt de l’empilement des contraintes et de charges. " La réalité de ce que vivent aujourd’hui les éleveurs n’est pas qu’une question de prix, elle est aussi le fruit des contraintes et des normes franco-françaises qui sont exigées des producteurs français.  La France est le seul pays au monde qui impose le plus de normes environnementales à ses agriculteurs créant ainsi inégalités et distorsions de concurrence avec les autres pays. Il faut que cela cesse ! " clame le sénateur.