Le Pacte vert... et noir de la Commission européenne

Selon une étude de la Commission relatée par le Copa-Cogeca, les stratégies Farm to fork et Biodiversité entameraient le potentiel productif de l’UE, affaibliraient les exploitations et la compétitivité des agriculteurs européens, en déplaçant les impacts environnementaux vers les pays tiers.

Les organisations professionnelles le réclamaient à cor et à cri, la Commission européenne vient de répondre partiellement à leur requête. Dépendant de la Commission, le Joint Research Center (JRC) vient de publier un rapport évaluant les impacts de deux stratégies inscrites dans le Pacte vert, à savoir Farm to fork (de la fourche à la fourchette) et Biodiversité. Selon le Copa-Cogeca, qui l’a consulté, tous les secteurs afficheraient des baisses de production comprises entre 5 à 15 %, l'élevage étant potentiellement le plus touché. « L'évolution de la production conduirait à une diminution des positions nettes d'exportation pour les céréales, porc et volaille, et à une aggravation du déficit commercial de l'UE pour les oléagineux, fruits et légumes, viande de bœuf, de mouton et de chèvre », relate dans un communiqué l’organisation fédérant syndicats agricoles et coopératives. Les coûts de production afficheraient une augmentation nette de l'ordre de 10 % avec un impact négatif pour les revenus de la plupart des agriculteurs ».

Les objectifs des deux stratégies

Afin de lutter contre le changement climatique et la dégradation de l’environnement, l’UE a défini en décembre 2019 une nouvelle stratégie de croissance durable baptisée Green deal (Pacte vert), visant la neutralité carbone d’ici à 2050 et réduisant les impacts environnementaux. Tous les secteurs économiques sont concernés (agriculture, énergie, transports, industrie, bâtiment, nouvelles technologies...). La transposition agricole du Green deal s’opère via deux programmes distincts que sont la stratégie Biodiversité et la stratégie Farm to fork (de la ferme à la fourchette), avec des objectifs à 2030.

S’agissant de la biodiversité, la stratégie prévoit de porter l’agriculture biologique à 25% de la SAU), d’augmenter les éléments du paysages riches en biodiversité et de requalifier 10% des terres agricoles en haute diversité biologique (mares, bandes tampon, haies...). Elle vise à enrayer le déclin des pollinisateurs et à réduire de 50 % l’utilisation et la nocivité des pesticides, de 20% l’usage des engrais chimiques et de 50% l’usage des antibiotiques dans l’élevage et l’aquaculture.

La stratégie Farm to fork vise à réduire l’empreinte environnementale et climatique de notre système alimentaire, incluant la production, le transport, la distribution, la commercialisation et la consommation, assortie d’une réduction de 50% du gaspillage.

Délocalisation de l’agriculture

Toujours selon ce rapport, la mise en œuvre de ces deux stratégies induirait une réduction de 28% des émissions de gaz à effet de serre. Mais le Copa-Cogeca relève que plus de la moitié de cette économie serait oblitérée par l’augmentation des émissions dans les pays tiers voués à compenser nos déficits de production.

« Si nous ne voulons pas organiser la délocalisation d'une partie de notre agriculture vers des tiers pays, l'Union européenne doit être aussi ambitieuse dans sa politique commerciale qu'elle l'est avec ses stratégies internes », a commenté Pekka Pesonen, secrétaire général du Copa-Cogeca. Aujourd'hui, ce n'est tout simplement pas le cas. Ce grand écart sera insupportable pour nos agriculteurs et coopératives à long terme ».