Les abattoirs bretons profitent du plan de relance

Après une année 2020 marquée par les contraintes hors normes causées par le Covid-19, les abattoirs de porcs bretons préparent l’avenir en postulant aux fonds du plan de relance.

Covid oblige, l’année 2020 fut pauvre en investissements dans les outils d’abattage et de transformation bretons. La priorité était de faire face à toutes les difficultés générées par la crise. Alors que celle-ci a perduré en 2021, malgré un allègement des contraintes, de nombreux acteurs bretons se sont engagés dans des programmes de modernisation, parfois de grande ampleur. L’explication de ce revirement se trouve dans le vaste plan européen de soutien à la relance économique, décliné au niveau national sous le vocable de France relance. Ce programme, d’un montant total de 100 milliards d’euros au niveau national, prévoit une enveloppe de 1,2 milliard pour le secteur agricole, dont 130 millions pour la modernisation des abattoirs. Les industriels bretons n’ont pas laissé passer cette aubaine : 24 abattoirs ont profité du dispositif pour un montant total de subventions de 26,8 millions d’euros. Parmi ces 24 sites, cinq concernent des gros abattoirs spécialisés en porc et quatre autres des abattoirs multiespèces incluant le porc.

 

 

 

Une incitation forte pour investir

Parmi les entreprises ayant plébiscité le plus ce plan de relance, la Cooperl se distingue avec deux projets bénéficiant du plafond des 2 millions d’euros d’aide. Le premier concerne un investissement d’un montant de 15,9 millions d’euros dans leur abattoir de Montfort-sur-Meu. Il vise à améliorer le bien-être animal et les conditions de travail. Le deuxième projet du géant costarmoricain prévoit d’investir près de 10 millions d’euros dans l’abattoir de Lamballe, là encore pour l’amélioration du bien-être animal et de la compétitivité de l’outil. Par ailleurs, en dehors du plan de relance, la Cooperl souhaite construire un nouveau bâtiment pour son siège social à Lamballe, actuellement enclavé au cœur des bâtiments industriels de la coopérative. Abera a elle aussi soumis un appel à projet dans le cadre de France relance. Celui-ci porte sur la modernisation du processus de découpe et l’augmentation de sa capacité de production et de la valeur de ses produits. Au total, 4,7 millions d’euros devraient être dépensés avec une subvention de 1,9 million et à terme 27 emplois créés. Deux autres abattoirs bretons spécialisés en porc ont postulé avec succès à l’appel à projet France relance. Ils appartiennent au groupe Jean Floc’h : la société Bernard, à Moréac, et Loudéac viandes. Dans les deux cas, il s’agit de moderniser les usines, notamment en développant l’automatisation. Les projets s’élèvent respectivement à 2,6 et 4,3 millions d’euros pour des subventions de 1 million et 1,7 million d’euros. L’entreprise Kermené, filiale du groupe Leclerc, bénéficie de 1,9 million d’euros d’aides publiques qui porteront essentiellement sur l’atelier porc, pour son abattoir situé à Saint-Jacut-du-Mené spécialisé en porc et en bovins. L’investissement total est de 4,5 millions d’euros.

Les petits abattoirs également concernés

Au-delà de ces gros acteurs de la filière porc, ce plan de relance a aussi bénéficié à des abattoirs de plus petite taille, multiespèces, et souvent détenus par des collectivités locales. Les abattoirs du Faou, des communautés de communes de Lesneven et de Kreiz Breizh ont ainsi émargé au dispositif. De cet inventaire à la Prévert, il ressort que la plupart des principaux acteurs de la filière porcine bretonne ont profité de cette aubaine. Le montant total des investissements prévus s’élève à plus de 40 millions d’euros. Le taux élevé de subventions (10 millions d’euros pour ces projets) du plan de relance a donc indubitablement permis de donner un coup d’accélérateur à la modernisation des outils bretons. Lorsque ces travaux seront réalisés, la filière sera en meilleure position pour affronter l’avenir.

Un plan de modernisation des abattoirs axé sur le bien-être

Le volet « modernisation des abattoirs » du plan de relance affiche des objectifs d’améliorations de la protection des animaux, de santé et de protection au travail, de respect de la réglementation environnemental et sanitaire et de renforcement de la compétitivité des filières. Tout investissement jugé conforme à ces objectifs pouvait donc être éligible à ce plan qui prévoyait une aide publique de 40 % maximum du montant des dépenses et plafonnée à 2 millions d’euros par projet. Il s’agit d’un programme très incitatif qui a convaincu plusieurs acteurs d’en profiter. Ouvert en théorie jusqu’à la fin de l’année 2022, ce programme est désormais clos car l’enveloppe est déjà consommée.

Bigard et Cooperl confortent leur leadership

Au-delà de ces investissements, les grandes manœuvres de consolidation de la filière se sont poursuivies en 2021 avec Bigard et la Cooperl à l’offensive. Ces deux groupes poursuivent leurs opérations de consolidation. L’annonce de rachat la plus marquante concerne la reprise d’Abera par Bigard. En effet, le groupe Avril, qui détenait Abera, a fait le choix stratégique d’abandonner ses activités « produits carnés » pour se recentrer sur le végétal. Et c’est donc Bigard qui remporte la mise sur l’outil porc du géant français des filières françaises des huiles et protéines végétales. Abera abat 1,3 million de porcs par an à son site de Maen Roch, en Ille-et-Vilaine. Alors que Bigard et la Cooperl abattaient environ le même nombre de porcs au niveau national, ce rachat permet à Bigard de doubler son concurrent. La Cooperl reste cependant le premier abatteur breton avec 29 % des abattages régionaux. Bigard passe, lui, de 13 % à 22 % du total breton. L’entreprise familiale bretonne assoit plus que jamais sa position de leader français de la viande. La Cooperl continue aussi de tracer son sillon. La coopérative de Lamballe a racheté l’ancien site de l’abattoir Gad le 4 mai 2021. Elle y prévoit la création dans un premier temps d’un atelier de congélation faisant travailler une cinquantaine de personnes. Elle indique aussi avoir l’intention de relancer une activité d’abattage-découpe, avec la création de 500 emplois directs. Ces projets sont cependant retardés pour l’instant. L’entreprise met en avant le contexte international et les difficultés que connaît actuellement la filière. Aucun échéancier n’a été communiqué.