Menaces sur le maïs

[Edito] Je fais le bonheur des cinéphiles mais pas celui des écolos qui trouvent que je consomme trop d'eau. J'ai beau venir d'Amérique du sud, je résiste mal à la sécheresse. Qui suis-je ? Le maïs bien sûr, dont la récolte, qui bat son plein en France, s'annonce déjà comme la pire du 21e siècle.

L'été 2021, doux et pluvieux, avait bien profité au maïs. Tout l'inverse de cet été 2022, exceptionnellement chaud et sec, catastrophique pour bon nombre de cultures de printemps. Double peine cette année : les maïs ont subi à la fois le manque de pluie et les restrictions d'irrigation. Résultats (encore provisoires, car une partie des surfaces de maïs grain pourrait finir en ensilage pour nourrir les bêtes) : la production française est d'ores et déjà annoncée comme la pire du 21e siècle, en repli de 19% par rapport à l'an dernier et de 9% par rapport à la moyenne des cinq dernières années. 

La situation n'est pas plus reluisante à l'échelle européenne, puisque de nombreux pays ont été impactés par la sécheresse et par les vagues de chaleur, coïncidant avec la période de floraison des maïs. Selon la Commission européenne, le rendement global des maïs grains serait inférieur de 16% à la moyenne quinquennale. 

En conséquence, les importations de maïs au sein du Vieux continent sont record pour cette période de l'année, avec des origines principalement brésiliennes et ukrainiennes. Ces dernières sont en augmentation de semaine en semaine, depuis la mise en place du « corridor sécurisé » de transport des céréales sur la mer Noire le 22 juillet. Ce corridor a permis de sortir les millions de tonnes bloquées dans les silos ukrainiens qui faisaient défaut au marché mondial. Mais il est remis en question par Vladimir Poutine, qui estime que les bateaux sont davantage dirigés vers l’Europe que vers les pays les plus pauvres. Or, selon Agritel, seuls 35% des grains au départ des ports en eau profonde d’Ukraine sont à destination de l’Europe, le reste à destination des pays à risque, notamment le Maghreb. Comme depuis de nombreux mois déjà, la Russie souffle le chaud et le froid sur les cours, rendant les marchés nerveux et volatils. 

De l’autre côté de l’Atlantique, à l’heure où les semis de maïs débutent en Argentine, c’est le phénomène météorologique La Niña, synonyme de climat sec, qui inquiète et qui pourrait impacter la production mondiale à venir. 

Les prix évoluent actuellement dans une fourchette haute, tout comme ceux des intrants, et les producteurs craignent “l’effet ciseau” si les deux courbes venaient à se croiser. Si l’on ajoute le risque d’un manque de semences et d’engrais, l’incertitude est totale pour les semis de maïs 2023.