Modulation et localisation : les réponses du machinisme aux défis de la transition

Le machinisme agricole n’échappe pas à la diffusion de nouvelles technologies qui s’appliquent à la pulvérisation, à la fertilisation ainsi qu’au semis. L’usage de la donnée, de la captation à son exploitation à des fins agronomiques, y est ainsi de plus en plus présent afin d’apporter le bon produit au bon endroit, de manière modulée et ultralocalisée

Un des défis de l’agriculture réside dans la diminution du recours aux produits phyto sanitaires, au rang desquels les herbicides figurent en bonne place avec 46 % des produits vendus en 2018 (source Phyteis, ex UIPP).

Les constructeurs de machines se sont saisis du sujet avec de nouveaux modèles particulièrement perfectionnés qui arrivent sur le marché de la pulvérisation. Ainsi, Amazone s’est allié à Bosch et BASF (Xarvio) pour développer la technologie Smart Sprayer, quand John Deere a conçu son offre See & Spray qui permet une pulvérisation ultra-localisée ciblant les adventices, de manière à réduire les doses d’herbicides.

Même philosophie chez Berthoud qui propose la technologie Sniper après 3 ans de test et 10 000 ha d’essais agronomiques ou encore chez Ecorobotix qui démarre la commercialisation de son pulvérisateur porté Ara. En pratique, ces machines vont identifier les adventices dans la végétation (vert sur vert) ou sur sol nu (vert sur marron) et les différencier des plants cultivés pour indiquer au pulvérisateur où l’application doit être déclenchée. Pour arriver à ce résultat, les constructeurs intègrent à leurs machines des solutions d’intelligence artificielle entraînées par l’apprentissage de chaque culture afin d’assurer une bonne détection.

Ces algorithmes vont analyser les milliers d’images recueillies par les capteurs présents sur la rampe. La pulvérisation, est, quant à elle, assurée par des buses à pulsation (dites PWM) associées à une modulation à la buse. Ces solutions ultra technologiques, si elles sont prometteuses, restent extrêmement coûteuses. En face, l’optimisation de l’IFT est estimée par les constructeurs entre 45 et 85 %, au bénéfice de l’environnement. La réduction du poste phytosanitaire dans le compte d’exploitation est quant à elle conditionnée à la préparation du bon volume de produit, en fonction des besoins de la parcelle. Sur le fond, c’est un changement de paradigme entre une application dans le champ entier avec du recouvrement et une application hétérogène, ultra-localisée au niveau du plant.

La modulation de la fertilisation azotée est également un sujet sur lequel les machinistes travaillent, d’autant plus dans le récent contexte haussier du prix des engrais. Claas a ainsi développé la solution crop sensor fixée à l’avant du tracteur. Yara propose une solution similaire avec le N Sensor. Dans les deux cas, des capteurs vont effectuer plusieurs centaines de mesures à la seconde pour calculer des indices de biomasse afin de déterminer ensuite les besoins en azote et les doses d’apport qui sont ensuite communiquées au terminal Isobus puis à l’épandeur. La prise en compte de l’hétérogénéité des parcelles conduit selon le constructeur à des économies de l’ordre de 5 à 10 % et à une augmentation du rendement d’environ 2 %.

■ Enfin, les semoirs sont à la fois l’objet d’ajouts de technologies embarquées et d’évolutions leur permettant davantage de fonctionnalité pour répondre aux besoins de chaque agriculteur. Ces évolutions participent aux changements de pratiques agronomiques : semis direct, mono-graine, de couverts avec des densités différentes, etc. De fait, les trémies se multiplient chez tous les constructeurs permettant de semer mais également de fertiliser. Les différents produits peuvent être semés au même endroit ou disposer de descentes séparées jusqu’à la mise en terre. S’agissant de la fertilisation, elle pourra être apportée en amont de la barre de semis, ou directement avec les semences, en dépit de risques de brûlures. Des tests menés par Arvalis indiquent que la localisation des apports de phosphore au semis du blé permet d’augmenter le rendement de plus de 2 quintaux à l’hectare par rapport à l’épandage en plein. Enfin, certains adeptes de l’agriculture de précision commencent à ajuster densité du semis et variété semée au potentiel de manière intra parcellaire.

 ■ C’est donc un machinisme innovant et proposant des solutions pour répondre aux défis de la transition qui était visible dans les allées du SIMA. Pour autant, au-delà de la démonstration technologique, allier plus-value agronomique, environnementale et économique sera clef pour assurer leur large diffusion

L’analyse de la conjoncture et de l’actualité agricole et agroalimentaire - Décembre 2022 (PRISME)