Pommes de terre : incertitudes sur les marchés

Beaucoup de cultures industrielles sont des cultures de printemps. Les conditions météorologiques ayant été globalement défavorables, la production de la plupart des cultures industrielles a été impactée et leurs débouchés subissent également la crise de la Covid-19.

Une production contrariée par la météo et hétérogène

S’il est trop tôt pour estimer précisément la production de pommes de terre 2020, les volumes seront fortement réduits par rapport à la campagne précédente. Les caprices de la météo ont durement impacté les régions où la sécheresse a sévi, en particulier sur les cultures non irriguées. La pomme de terre aime l’eau !

L’impact sécheresse se marque aussi sur la qualité des tubercules avec des teneurs en matière sèche très élevées, rendant les pommes de terre très sensibles aux chocs et provoquant des noircissements internes. Ces défauts sont particulièrement gênants pour le débouché industriel.

En outre, les premiers arrachages ont été effectués sous des températures élevées et certains lots ont été déclassés voire perdus. Par la suite, la pluviométrie est devenue trop excessive pour permettre des arrachages en bonnes conditions et, au 20 octobre, environ 75 % des surfaces de pommes de terre de conservation étaient récoltées. 2020 est aussi la première année sans l’antigerminatif CIPC. Les producteurs auront dû prendre toutes les précautions nécessaires pour nettoyer soigneusement leurs bâtiments de stockage au regard de la persistance du produit.

Marché industriel et marché du frais atones

La demande industrielle reste en dessous de la normale d’environ 10 à 15 %.

Quelle sera la sole en 2021 ?

Les surfaces de pommes de terre ont considérablement augmenté ces dernières années dans la perspective du développement du marché de l’industrie. Les agriculteurs, soucieux de diversification ou de création de valeur, se sont tournés vers cette production, et cet engouement a été renforcé, notamment dans les Hauts de France, par des producteurs belges à la recherche de nouvelles surfaces. La faiblesse de la production 2020 sur ces nouvelles surfaces souvent non irriguées vient remettre en question l’intérêt de la démarche.

Certains producteurs belges auraient d’ailleurs annoncé leur retrait de certains secteurs.

Plusieurs défis attendent la filière

Le marché de la pomme de terre a toujours été spéculatif et l’amplitude de sa réaction face à un faible déséquilibre offre/demande est très grande. La question est de savoir si la discipline collective sera suffisante pour amortir une éventuelle aggravation de la pandémie dans un contexte de marché déjà saturé.

La sélection par la qualité des lots commercialisés rappelle que cette production nécessite un savoir-faire, un équipement performant, une bonne organisation et une capacité à encaisser les amplitudes de résultats. Avec le réchauffement climatique, l’irrigation devient un atout considérable. La protection phytosanitaire de la culture étant lourde, un autre challenge sera à relever dans les prochains mois, celui de s’insérer dans une démarche qualité de réduction des intrants et plus particulièrement des produits de synthèse.

Article de la veille économique décembre 2020 - Thierry LEMAÎTRE Cerfrance