Prix : " Le point noir, ce sont les marques de distributeurs "

En avril, la FDSEA et les JA ont comparé les prix des produits laitiers dans les GMS avec ceux préconisés par la FNPL pour assurer une juste rémunération du producteur. Sur 80 produits, 14 respectent les prix planchers. L’interview d'Alban Courtecuisse et d'Éric Hatteville, responsables lait JA et FDSEA.

>> Quelle méthodologie avez-vous mise en place ?
Éric Hatteville :
La FNPL a établi un prix plancher, qui prend en compte la marge des industriels et des distributeurs, en dessous duquel il est impossible de rémunérer le producteur, dans l’esprit de la loi Egalim et de France terre de lait (voir encadré). Nous sommes allés relever les prix, en binôme JA - FDSEA. Les GMS ont été prévenues par un courrier, quinze jours avant, où nous leur indiquions les prix planchers.
Alban Courtecuisse : Pour ma part, je suis allé tout seul dans un magasin. Je n’avais pas prévenu le responsable, mais tout s’est bien déroulé. Je tiens d’ailleurs à saluer toutes les personnes qui se sont impliquées dans cette action.

>> Quel constat faites-vous ?
A. C. :
Le point noir, ce sont les marques de distributeurs (MDD). Les GMS ne respectent pas la loi Egalim et ne répercutent pas les coûts de production. Sur les MDD, nous avons du mal à faire avancer les choses. Il faudrait aussi savoir quelles sont les laiteries qui les fournissent, car elles ont leur part de responsabilité. Mais les GMS ont validé, à travers France terre de lait, le fait que le revenu des agriculteurs soit un enjeu majeur de la filière laitière. Elles ne respectent pas leur parole.
E. H. : Le constat est cinglant. Alors que nous avions prévenu les structures, je suis surpris qu’il y ait autant d’irrégularités. Nous avons trouvé 66 produits non conformes en prix. Il y a une grosse bagarre sur les prix des yaourts nature, souvent des produits d’appel pour les consommateurs. Ce sont aussi des produits qui font du volume. On a vu du lait en promotion à 0,74 €/l tout pile (prix indiqué par la FNPL, ndlr). Les relevés montrent surtout des problèmes sur les MDD.

>> Y a-t-il eu des bonnes surprises ?
A. C. :
Dans le magasin où je suis allé, alors que je n’avais pas prévenu de mon passage, les deux tiers des produits respectent les prix estimés par la FNPL.
E. H. : Oui, sur les camemberts de marque qui respecte les prix. N’avons pas trouvé de promotions abusives, rien n’est illégal.

>> Quelle suite donnez-vous à l’opération ?
E. H. :
Les relevés ont été envoyés à la FNPL. On vérifiera si les engagements pris au sein de France terre de lait sont respectés. Les directeurs de magasins ont dit qu’ils feraient remonter les informations, car ce ne sont pas eux les décideurs. S’il y a beaucoup de remontées, on peut espérer qu’il y aura un impact. Aller voir régulièrement les GMS les fait se sentir surveillées.
A. C. : On peut se servir de ces données pour prouver que les GMS ne mettent pas tout en œuvre pour améliorer le revenu des producteurs. L’inflation est repartie pour les produits du quotidien, le bois, la ferraille… pour tout sauf la viande et le lait. Ça ne peut pas continuer comme ça si on veut installer des jeunes. Nous devons garder des fermes transmissibles. Il en va de la pérennité de la filière.

France terre de lait
France terre de lait est née en 2017, à la suite des EGA. France Terre De Lait est l’engagement de l’interprofession à garantir pour chaque litre de lait et chaque produit laitier français son origine France, le haut standard de qualité de la filière laitière française et le savoir-faire de chacun de ses acteurs.