Produits locaux : de nouvelles opportunités de commercialisation en GMS

Pour être en adéquation avec les attentes sociétales, la grande distribution recherche des partenariats commerciaux avec des producteurs locaux. Si le débouché peut sembler intéressant pour ces derniers, il impose la mise en place d’une méthodologie rigoureuse en amont.

Le courant actuel du manger local est une vraie opportunité pour les agriculteurs qui voudraient trouver un nouveau débouché pour leur production. Et local ne veut pas systématiquement dire vente directe. La grande et moyenne distribution (GMS) dans un périmètre plus ou moins vaste autour de l’exploitation est également une solution à envisager. « Les producteurs ont plus de poids qu’il y a quinze ans car le consommateur veut des produits locaux. Vous ne représentez pas forcément du chiffre mais une attente et une image positive », résume Thomas Lesoin, dirigeant de la Brasserie du Bouffay à Nantes.

Il s’exprimait lors d’un webinaire organisé sur le sujet par la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Nantes-St Nazaire. Cet événement faisait suite à la signature d’une charte d’engagement avec Auchan, E.Leclerc, Intermarché, Système U et Carrefour pour promouvoir et développer les produits locaux en enseigne de distribution.

« Cette démarche avec autant de distributeurs est une première à l’échelle nationale. Nous aimerions la diffuser sur l’ensemble des Pays de la Loire », espère Fabien Vignal, conseiller en commercialisation à la Chambre d’agriculture.

Comme souvent, c’est lors de périodes compliquées que naissent les belles initiatives. C’est le cas de la charte d’engagement signée à la suite de difficultés d’approvisionnement durant le premier confinement. « D’une part les enseignes étaient en rupture de stock et d’autre part il y avait des producteurs qui souhaitaient entrer en contact avec les enseignes mais qui ne savaient pas comment faire », résume Michelle Delcroix-Fialeix de la CCI.

Se faire accompagner

Fiche technique du produit, agrément sanitaire pour les productions animales, étiquetage conforme ou encore procédure formalisée de retrait/rappel… Autant d’aspects techniques qu’il est nécessaire de connaitre pour accéder au marché de la GMS. Pour s’y retrouver dans ce labyrinthe normatif, la Chambre d’agriculture propose aux agriculteurs de Loire-Atlantique de les accompagner. « Nous jouons le rôle de régulateur et d’accompagnateur. L’idée est d’amener de la méthodologie afin que les producteurs ne partent pas désordonnés. Mon travail en particulier consiste à analyser les aspects positifs et négatifs de chaque produit et d’établir une stratégie en fonction », souligne Fabien Vignal.

En matière de stratégie justement, la première décision à prendre concerne la cible à viser. Deux choix s’offrent aux producteurs. Ils peuvent commercialiser leur production de gré à gré directement auprès des magasins ou passer par les centrales d’achats afin d’être référencés sur l’ensemble de la région. « Tout dépendra du volume. Un producteur de fromage qui doit écouler une tonne de produit pourra s’adresser aux quelques magasins autour de chez lui. Par contre si la production représente 30 tonnes, la centrale d’achat peut être une solution plus adaptée », illustre le conseiller de la Chambre d’agriculture ligérienne.

"Nous restons maîtres de nos ventes"

En Loire-Atlantique, la ferme de Mezerac commercialise depuis 2010 la totalité des yaourts, fromages blanc, beurres et crèmes transformés sur l’exploitation à la GMS. « Au début, nous passions par les centrales d’achats. Mais avec les volumes importants, les conditions étaient compliquées, nous avons décidé de repasser en direct avec les magasins. C’est plus confortable pour nous », se souvient Chantal Brière, l’une des trois associés de l’exploitation. C’est aussi ce choix de vente en direct aux magasins qu’a fait la brasserie du Bouffay. « Nous sommes contents de notre choix car nous restons maîtres de nos ventes. Il y a aussi le fait que nous restons petits face à une centrale d’achat. Aujourd’hui nous savons que nous pouvons perdre un magasin mais pas cinquante d’un coup », analyse Thomas Lesoin.

Le temps à passer représente le revers de la médaille de ce mode de commercialisation en direct aux magasins. « Il faut entretenir la relation avec le chef de rayon mais aussi avec le directeur. Il faut être persévérant et renouveler les appels régulièrement. Quand le chef de rayon change, il est nécessaire de recommencer tout le travail », assure Chantal Brière. Pour ne pas perdre de temps sur la commercialisation, la Brasserie du Bouffay a fait le choix de déléguer toute la partie relationnelle avec la GMS à une agence. « Ils prennent un pourcentage des ventes mais ça nous évite toute la démarche de référencement et de démarchage pour laquelle il faudrait embaucher », détaille le dirigeant de l’entreprise.