Sorgho et miscanthus à la conquête des débouchés biomatériaux et énergie

L’utilisation de Sorgho et de miscanthus progresse pour la production d’énergie et de matériaux biosourcés. Les deux espèces ont fait l’objet d’un programme d’investissement d’avenir entre 2012 et 2020 : Biomass for the future.

Le miscanthus est de plus en plus utilisé pour le paillage horticole et la litière pour animaux. Il peut entrer aussi dans l’élaboration de biomatériaux. C’était l’un des axes de recherche du programme Biomass for the future (BFF) qui s’arrête à la fin de l’année.

« Nous avons testé du « béton végétal » avec un apport de miscanthus à hauteur de 5 à 12 % en masse. La résistance à la compression de parpaings d’un tel béton permet une utilisation dans des murs non porteurs mais pas dans les murs porteurs, analyse Patrick Navard, chercheur à Armines. Le miscanthus est utilisé également dans des composites biopolymères pour l’industrie automobile, avec de bonnes performances techniques et environnementales, comparé à l’utilisation de fibre de verre. »

Recherche de sorghos plus vigoureux et tolérants au froid

Avec un potentiel méthanogène proche de celui du maïs, le sorgho dépasse nettement le miscanthus. Le sorgho, fourrager notamment, produit une biomasse qui le destine davantage à la production d’énergie qu’aux biomatériaux. « Les travaux de BFF ont porté entre autres sur la connaissance génétique et l’amélioration de cette espèce, présente Pascal Guillaumin, de Sorghum ID. Cela concerne notamment les caractères de tolérance au froid et de vigueur au démarrage, pour favoriser des semis plus précoces et éviter la sécheresse estivale. De nouveaux parents mâles et femelles sont également conçus pour la création d’hybrides répondant mieux au débouché de la méthanisation et à la culture en tant que Cive. »

Ne plus compter que sur un seul clone en miscanthus

Plante pérenne, l’approche variétale est complètement différente pour le miscanthus. « Il faut absolument diversifier sa génétique. Actuellement, un seul clone de Miscanthus giganteus est utilisé en Europe, avec un génome triploïde et une stérilité qui évite tout risque invasif. Le recours à un seul clone est risqué si un organisme pathogène venait à attaquer la culture par exemple, expose Herman Höfte, coordinateur du projet BFF à Inrae. Nous allons chercher plus de diversité variétale avec l’utilisation de Miscanthus sinensis, une espèce fertile qui peut se montrer invasive. L’idée est de reproduire des Miscanthus sinensis triploïde… » Les travaux portent aussi sur l’amélioration de biomasse du miscanthus (lignine, cellulose), sur ses caractères de qualité pour une utilisation dans les biomatériaux ou le biocarburant

Les recherches continuent après BFF

Avec un budget de 27 millions d’euros dont 10 millions provenant des fonds publics (ANR), BFF a réuni recherches publique et privée sur l’amélioration de deux espèces. Le programme est en passe d’être clos, mais le Cirad et des obtenteurs privés (Eurosorgho et RAGT semences) prennent le relais sur le sorgho pour faire perdurer une amélioration variétale dynamique.

C’est moins évident pour le miscanthus. « Nous avons posé les bases pour arriver à de nouvelles variétés mais ce sera très long. Les cultures pérennes sont très difficiles à valoriser pour les semenciers », remarque Herman Höfte. La recherche et développement s’organise malgré tout sur cette espèce. L’enjeu est de contribuer au remplacement des sources de carbone fossile dans le futur avec, en ligne de mire, l’objectif gouvernemental de zéro émission de CO2 en 2050.

Sorgho et miscanthus progressent en surface

La barre des 100 000 hectares en sorgho a été dépassée. « Les surfaces de sorgho ont progressé de 35 % en un an dans l’Hexagone pour atteindre 115 000 hectares (310 000 hectares en Europe) dont 28 000 hectares de sorgho de type fourrager et 3000 hectares dévolus au débouché de la méthanisation », précise Pierre Guillaumin, de Sorghum-ID. Le sorgho peut être utilisé comme culture intermédiaire à vocation énergétique (Cive). Quant au miscanthus, il couvre dorénavant 7000 hectares en France sur 1700 exploitations. « Cette espèce pérenne a progressé de 13 % par an au cours des cinq dernières années », chiffre Alain Jeanroy, de France Miscanthus. Les deux cultures ont comme atout d’être peu consommatrices d’intrants.