Space digital : une première... et dernière ?

Le 5 mai dernier, soit une semaine avant la sortie du confinement et quatre mois avant la tenue de l’évènement, les organisateurs du Space décidaient d’annuler l’édition 2020 alors que tous indicateurs de l’épidémie de coronavirus laissaient présager une sortie de crise. Une décision difficile mais que la suite de l’Histoire a crédibilisée. Le 15 juillet, l’idée d’un Space digital était actée, un succédané qui a permis de maintenir le lien entre la communauté et dont les effets perdurent, avec notamment les podcasts et les replay des conférences. Retour sur le Space 2020 avec sa Commissaire générale Anne Marie Quéméner, en attendant la prochaine édition, physique il va sans dire, programmée du 14 au 17 septembre 2021.

Space
Anne Marie Quéméner, Commissaire générale du Space

En date du 5 mai, vous décidez d’annuler le Space alors que la sortie du confinement et de l’épidémie se profile. Sur quoi repose alors votre décision ?

Anne Marie Quéméner : Nous aurions pu en effet prendre la décision de maintenir l’édition 2020, mais le fait que la jauge sanitaire fixée alors à 5 000 personnes prenait fin uniquement le 31 août nous laissait difficilement envisager d'accueillir en moyenne 30 000 personnes par jour sur le Parc-Expo deux semaines plus tard.  Il était également difficile à cette date de connaître les dispositifs sanitaires qui devraient être mis en place, et leur compatibilité avec un événement comme le nôtre. Une hypothèque pesait également fortement sur nos partenaires et visiteurs étrangers. La décision d’annuler le salon a fait l’unanimité au sein de notre comité d’organisation.

D’un point de vue financier, comment gère-t-on une annulation à quatre mois de l’échéance ?

A.M.Q. : Le règlement du Space fixe au 15 mars la date limite d’inscription. Les exposants doivent alors verser 50% de leur participation. Après la décision d’annuler, nous avons proposé aux exposants le remboursement de la moitié de leur versement, moyennant deux contreparties : l’attribution prioritaire de leur stand pour 2021 assortie de la déduction de la moitié de qu’ils ont au final versé pour l’édition 2020, ce qui équivaut à une remise de 12,5%. En décidant d’annuler le salon quatre mois avant l’échéance, nous avons permis à nos exposants d’éviter d’engager les dépenses hors location de stand et qui peuvent leur être supérieures. Le Space a lui-même ainsi évité bon nombre de dépenses. Dans leur très grande majorité, les exposants ont accepté notre proposition. Il en va de la pérennité du Space.

La crise du coronavirus interroge la stratégie marketing de certains exposants et par là-même l’existence même des salons. Un salon comme le Space est-il menacé ?

A.M.Q. : L’annulation du salon met à mal notre équilibre économique et nous avons dû recourir au chômage partiel, dont j’espère qu’il va perdurer pour une entreprise d’évènementiel comme la nôtre. Je veux croire qu’un salon comme le Space est un moment professionnel et convivial indispensable à notre secteur d’activité. Au-delà du Space, les salons et foires sont constitutifs de notre ADN agricole. C’est pour cette raison que nous avons souhaité organiser un Space digital pour entretenir les liens entre tous les membres de notre communauté et exactement aux mêmes dates que prévu, un repère important pour nos visiteurs.

Quels ont été les temps forts de l’édition digitale ?

A.M.Q. : Nous avons commencé par refondre notre site internet et notre application mobile pour être totalement en phase avec cette édition digitale. Nous avons mis en place une plateforme BtoB pour assurer la relation entre les exposants et les visiteurs porteurs de projets d’investissement. Les exposants ont par ailleurs eu la possibilité de mettre en avant trois produits ou services. Les Innov’Space, qui fêtaient cette année leurs 25 ans, ont été maintenus, au même titre que les conférences, au nombre de 85, sans compter un grand débat et une table ronde à laquelle a participé le ministre de l’Agriculture. La génétique a elle aussi bénéficié d’une vitrine numérique et nous avons même organisé une vente aux enchères. Nous avons enfin créé des podcasts, une première pour un salon agricole. Si elle ne remplace pas l’édition physique, l’expérience digitale a l’avantage de pouvoir se poursuivre dans les exploitations et les cabines des tracteurs, avec les replays des conférences et les podcasts.