Vaccination contre l’Influenza aviaire : les 3 scénarios et les 4 conditions de l’Anses

L’Agence de sécurité sanitaire propose une stratégie graduée fondée sur la disponibilité en vaccins et le contexte épidémiologique à l’automne prochain, tout en rappelant la primauté de la biosécurité. Le ministère de l’Agriculture a financé une précommande de 80 millions de doses de vaccin.

Le 22 décembre dernier, le ministère de l’Agriculture se mettait en ordre de marche pour élaborer une stratégie vaccinale ciblant les palmipèdes et les gallus, susceptible d’être mise en œuvre à l’automne prochain, sous réserve de disposer de vaccins efficaces, autorisés, disponibles et accessibles aux plans financier et logistique. En date du 6 mars, aucune de ses conditions suspensives n’a encore été levée, à commencer par l’efficacité vaccins. Mais compte tenu des imbrications réglementaires, industrielles et épidémiologiques du sujet, le ministère de l’Agriculture a construit un plan de bataille destiné à être opérationnel dès l’automne prochain, dans l’hypothèse où tous les voyants seraient au vert.

Il faut dire que le virus de l’Influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) est porteur d’une menace existentielle pour l’ensemble des filières volailles, en étant capable de décimer les maillons de la sélection et de la multiplication, en plus de la production. Mais pas seulement. « Vacciner les volailles les plus exposées permettra également de limiter la multiplication du virus et le risque de mutation pour éviter qu’il s’adapte aux mammifères et aux humains », argumente l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), rappelant ainsi que l’IAHP n’est pas exempte d’un risque de zoonose.

Au chapitre des bonnes nouvelles, on notera que, sur la saison 2022-2023 en cours, le compteur des foyers en élevages est bloqué à 315 depuis plusieurs semaines, contre plus de 1400 à l'issue de la saison dernière.

Prioriser les types d’élevage et les espèces avicoles à vacciner

Au regard des risques d’introduction et de diffusion de l’IAHP, l’Anses propose trois scénarios, établis selon une approche graduée, en fonction des moyens disponibles pour la vaccination. Le scénario 1 privilégie la vaccination des animaux présents dans les élevages assurant la sélection et la multiplication pour toutes les filières. Il a l’avantage de requérir un nombre limité de vaccins tout en protégeant e patrimoine génétique et en assurant le redémarrage de la production post-épizootie. Le scénario 2 élargit le périmètre aux élevages de palmipèdes (canards et oies) prêts à gaver et les autres palmipèdes élevés en plein air, aux dindes élevées en plein air et aux poulettes futures pondeuses destinées au plein air, autant de productions identifiées comme étant le plus à risque d’introduction et de diffusion du virus. Le scénario 3 inclut la vaccination des palmipèdes à rôtir et des dindes élevées en claustration, des galliformes de chair élevés en plein air autres que ceux listés pour le scénario 2 et des poules de ponte élevées en plein air.

Les conditions du succès

Selon l’Anses, le succès de ce qui est encore une hypothétique campagne vaccinale à l’automne 2023, sera suspendu aux conditions suivantes : un contexte épidémiologique est identique à celui existant aujourd’hui (souche virale H5N1 similaire à celle ayant circulé sur la saison 2022- 2023), une offre de vaccins permettant de vacciner chacune des espèces et induisant une immunité collective, la cohérence de la stratégie vaccinale avec les délais d’acquisition de l’immunité après l’administration du vaccin et avec la durée de la protection vaccinale et enfin sa compatibilité avec les pratiques d’élevage, notamment d’un point de vue logistique et économique.

La biosécurité avant tout

Enfin, l’Anses rappelle que la vaccination ne constitue que l’un des outils de lutte contre l’IAHP. « La bonne application des mesures de biosécurité en élevage avicole reste la mesure la plus efficace pour prévenir l’introduction et la diffusion de l’IAHP dans et entre les élevages. Ces mesures restent donc indispensables et la vaccination ne s’y substitue pas ». En outre, si elle est mise en œuvre, la vaccination imposera un protocole renforcé de surveillance des élevages vaccinés afin de détecter et d’éliminer au plus vite ceux qui s’avèreraient néanmoins infectés.

Les annonces du ministère

En réaction à l’avis de l’Anses, le ministère de l’Agriculture a indiqué que la proposition de stratégie fera l’objet d’une évaluation technico-économique d’ici la fin du mois d’avril, « sous réserve de résultats favorables de l’étude expérimentale menée sur les canards attendue pour la mi-avril ». Le cas échéant, une phase de concertation s’ouvrira avec la filière avicole, les vétérinaires et les collectivités pour définir d’ici l’été une stratégie vaccinale opérationnelle et ses modalités de mise en œuvre.

Enfin, le ministère annonce financer une précommande de 80 millions de doses de vaccin, « afin de garantir que la France dispose d’un volume de vaccins permettant de d’engager la campagne de vaccination à l’automne 2023 ».