ZNT : un impact compris entre 2% et 10% en Val de Loire

Interloire a réalisé des simulations d’impact des ZNT riverains sur huit communes viticoles disséminées dans quatre départements. La Fédération viticole d'Anjou et de Saumur dénonce les flous de l’arrêté et demande sa révision.

Anticipant la mise en place de Zones non traitées (ZNT) riverains le 1er janvier 2020, l'interprofession des vins du Val de Loire a réalisé l'an passé des simulations d'impact dans plusieurs communes viticoles disséminées dans son bassin de production. Les simulations ont été réalisées sur la base du parcellaire planté d'une part et des parcelles cadastrales incluant du bâti d'autre part. Des ZNT de 5 mètres et 10 mètres ont été retenues. « Dans les communes les moins impactées, les ZNT riverains représentent 2% des surfaces viticoles », déclare Marie Gasnier, directrice de la prospective. « Le taux dépasse les 10% dans les communes les plus impactées, en zones péri-urbaines notamment ». A long terme, l'interprofession s'est fixée pour objectif de déterminer l'impact des ZNT dans l'ensemble de son bassin de production, soit environ 52 000 hectares répartis sur quatre départements principaux.

Copie à revoir

Laurent Menestreau, président de la Fédération viticole d'Anjou et de Saumur, et vice-président d'Interloire, n'attendra pas la cartographie complète. Il dénonce les zones de flou qui entourent les modalités de l'arrêté. « Quel riverain est en mesure d'apprécier les conditions d'application qui régissent le produit appliqué à proximité de son habitation ? », s'interroge-t-il. « Quid du fermage et des taxes foncières sachant que les rangs ou les bouts de rangs non protégés ne produiront pas ? Quid de la valeur des vignes concernées ? Qui m'assure que les maires et les promoteurs immobiliers vont intégrer des distances de sécurité dans leurs futurs projets de construction ? Où épandra-t-on les boues urbaines si l'on continue de rogner les surfaces agricoles ? Et pourquoi conditionner la réduction de la ZNT de 10 mètres à 3 mètres à la signature d'une charte ?.Il y a trop de flou et d'incohérence dans cet arrêté ZNT qui doit être révisé ».

S'agissant des chartes de voisinage, les différentes fédérations viticoles du Val de Loire devront se mettre d'accord sur un projet de texte, qu'elles soumettront aux Chambres d'agriculture, chargées de la concertation avec les autres parties prenantes. « Nous exigeons que le même texte s'applique dans tout le Val de Loire car la problématique est la même où que l'on se place », précise Laurent Menestreau, qui ne rejette pas en bloc toutes les dispositions règlementaires. « Que l'on prenne des précautions particulières vis-à-vis des produits classés cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques me parait sensé, au même titre que le recours aux panneaux de confinement sur les pulvérisateurs ».

L'anticipation des ODG

En attendant les prochains épisodes, Interloire explore tous les leviers qu'il est possible d'activer pour réduire la portée des ZNT sur le potentiel de production et in fine sur l'économie du vignoble. Parmi ces leviers figure l'accompagnement financier des viticulteurs dans l'achat de matériel apte à réduire les ZNT au minimum légal, soit 3 mètres contre 10 mètres en l'absence de moyens anti-dérive, en dehors du cas des substances les plus préoccupantes (20 mètres). Interloire mobilise par ailleurs des moyens pour soutenir la mise au point et la diffusion de solutions de biocontrôle, lesquelles ne sont pas concernées par les ZNT riverains. « De nombreux organismes de défense et de gestion intègrent d'ores-et-déjà dans leur cahier des charges des mesures agro-environnementales », indique Marie Gasnier. « De leur côté, des syndicats viticoles ont signé des chartes entourant l'usage et l'application des produits phytosanitaires à proximité des habitations et des lieux publics sensibles. Certains ont procédé à des plantations de haies pour renforcer la protection ».

Transition écologique et climatique

Pour compenser les pertes d'exploitation inhérentes aux ZNT, Interloire mise sur la rénovation du vignoble, la plupart des appellations se situant en-deçà des plafonds de productions autorisés. De nombreuses appellations offrent par ailleurs des réserves foncières aptes à être plantées. « L'interprofession a entamé un gros travail de cartographie des sols et des terroirs », explique Marie Gasnier. « Le changement climatique est aussi l'occasion de se questionner sur des extensions de territoire, au sein même de nos AOP et IGP. On peut également s'interroger sur le renoncement à exploiter certaines parcelles dont l'exposition était considérée comme inapte à la production de vin jusqu'à présent ». Un travail d'autant plus nécessaire que l'urbanisation va se poursuivre.

Au-delà du mètre linéaire

L'interprofession, qui voit dans le dialogue avec la société civile une des clés de la restauration de la confiance entre les deux parties, fait le constat imparable suivant : « Le vignoble du Val de Loire commercialise 80% de sa production en France », relève Marie Gasnier. « Pour faire court, nos riverains sont nos clients. Notre vignoble a fait par ailleurs de l'œnotourisme un des éléments stratégiques de son développement. Par conséquent, on ne peut pas s'opposer frontalement au ZNT et se focaliser sur le mètre linéaire. On doit poursuivre le travail d'adaptation aux attentes sociétales, lesquelles ne vont pas se démentir dans les années à venir ».

Et pour peser dans le débat, pour vulgariser les changements de pratiques ou encore pour prévenir l'urbanisation galopante, c'est peut-être le moment de s'impliquer dans le scrutin municipal à venir. « J'ai des idées à soumettre aux maires pour faire valoir la qualité de nos pratiques auprès de nos concitoyens », déclare Laurent Menestreau. « Mais en période électorale, tous me font savoir que mes idées seront les bienvenues après le second tour... ».