Vignes gelées : objectif bois de taille !

Après un gel conséquent, il est important de s’occuper des rameaux restants ou qui repoussent, afin d’assurer la pérennité du cep. La priorité doit être donnée aux plantiers puisque l'on établit avec cela des structures pour toute la vie du cep.

Après un long mois d’attente, les nouveaux bourgeons sont enfin ressortis sur les vignes ayant gelé début avril. Maintenant que les rameaux ont repoussé, c’est le moment de faire un bilan et éventuellement d’intervenir. Pour Bernard Genevet, consultant à l’Institut coopératif du vin (ICV) de Nîmes, le plus important est de faire des arbitrages et de gérer les priorités. « Si l’on n’a pas les moyens ou pas le temps d’intervenir sur toutes les parcelles, il faut donner la priorité aux plantiers », dit-il. En effet, certains organes nécessaires pour la bonne formation du cep ont été détruits, et il est parfois pertinent de repartir sur de bonnes bases (voir vidéo et encadré ci-dessous). Sur les vignes adultes, l’ébourgeonnage peut être utile pour préparer la taille hivernale, d’autant plus si la vigne a été fortement touchée et que les repousses sont buissonnantes et anarchiques. Il s’agit donc de sélectionner les rameaux à conserver lors de la taille afin qu’ils fassent de beaux bois en cohérence avec l’architecture du cep, et d’aérer le feuillage pour améliorer l’induction florale pour l’année suivante. « Sans ébourgeonnage, le chantier de taille est par ailleurs plus chronophage de 30 à 40 % », ajoute Anastasia Rocque, de l’IFV. Quoi qu’il en soit, que le viticulteur choisisse d’ébourgeonner ou pas, il devra faire en sorte que les vignes soient dans les meilleures conditions pour repartir d’un bon pied.

Soigner le palissage pour protéger ce qui reste

C’est-à-dire réaliser un entretien du sol soigné pour limiter la concurrence azotée et hydrique et une protection phytosanitaire impeccable afin de conserver un feuillage sain, fonctionnel et assurer un bon aoûtement et la mise en réserve. Cela évite aussi l’installation d’un inoculum important pour la prochaine campagne. « Surtout on n’arrête pas le travail, et en cas de difficulté on en parle avec son conseiller pour cibler les priorités », assène Bernard Genevet.

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Les traitements seront bien sûr adaptés en fonction de la reprise de la végétation et du développement de la vigne. Selon le consultant, il est également nécessaire, en plus de la protection phytosanitaire, de protéger « physiquement » la vigne en palissant correctement et en attachant en vert s’il le faut. « Il faut sécuriser l’outil de production : s’il n’y a plus qu’un rameau sur le courson et qu’il casse, c’est foutu », dit-il. En ce qui concerne la fertilisation, rien ne vaut un peu de chaleur et de l’eau estime Bernard Genevet. « Si vraiment la pousse est très lente et que les feuilles sont jaunes, on peut réfléchir à un apport d’engrais foliaire, mais rien de systématique », concède-t-il. Des apports à raisonner d’autant plus qu’un excès d’azote entraîne des risques de coulure, de redémarrage anarchique et de mauvais aoûtement : tout ce dont on n’a pas besoin après un gel. Plus tard dans la saison, il faudra veiller au bon état hydrique de la plante et ne pas faire l’impasse sur l’irrigation si besoin.

Une attention particulière pour les plantiers

Sur les jeunes plants, l’enjeu de sélection des rameaux restants est d’autant plus important que de cela va influencer la vie du futur cep. « Dans certains cas il vaut mieux décaler la mise en production d’un an et faire en sorte de reformer le jeune plant correctement », expose Bernard Genevet. Sur un plant de deux ans (où la baguette vient d’arriver au fil porteur), il est parfois nécessaire de rabattre le tronc et garder un rameau plus joli qui part de la base et qui n’a pas gelé. De même sur les nouvelles baguettes (cordon), il peut y avoir d’importantes fenêtres qui empêcheront de laisser des coursons à l’hiver. Dans ce cas, mieux vaut alors les couper pour favoriser les rameaux près du tronc et refaire de beaux bras l’année suivante. Olivier Yobrégat, de l’IFV, ajoute qu’il est utile sur les plantiers également de « soutenir la croissance en évitant les stress hydriques et azotés par le travail du sol, l’irrigation et une fertilisation foliaire éventuelle ». Pour lui, repousser la mise à fruit d’un an permet également de limiter l’impact d’un second débourrement sur ces jeunes plants avec peu de réserves.